Djibouti
06.10.05
Interventions urgentes

Djibouti: Libération et licenciement abusif de plusieurs syndicalistes

DJI 002 / 0905 / OBS 084.1

Libérations / Licenciements abusifs
Djibouti

6 octobre 2005

L’Observatoire pour la protection des défenseurs des droits de l’Homme, programme conjoint de la Fédération internationale des ligues des droits de l’Homme (FIDH) et de l’Organisation mondiale contre la torture (OMCT), a reçu de nouvelles informations concernant la situation à Djibouti.

Nouvelles informations:

L’Observatoire a été informé par la Ligue djiboutienne des droits humains (LDDH) et l’Union des travailleurs du port (UTP) de la libération de tous les dirigeants syndicaux et travailleurs syndiqués qui avaient été arrêtés à la suite d’un mouvement de grève générale.

Selon les informations reçues, le 2 octobre 2005, MM. Kamil Mohamed Ali, Ibrahim Moussa Sultan, Mohamed Ahmed Mohamed, Ali Ibrahim Darar, Mohamed Abbdillahi Dirieh, Moustapha Abchir Egueh, Mohamed Abdillai Omar, Mohamed Ahmed Ali, Samira Hassan Mohamed, Koulmiyeh Houssein et Djibril Houssein Awaleh, dirigeants de l’UTP arrêtés et placés en garde à vue entre le 25 et le 28 septembre, puis en détention provisoire le 29 septembre 2005 à la prison de Gabode, ont été relaxés par décision du tribunal de première instance de la Cour correctionnelle le 2 octobre 2005. Toutefois, le bureau du procureur a initié une procédure d’appel contre cette décision, et l’audience devrait avoir lieu à partir du 15 octobre 2005.

En outre, l’ensemble des grévistes et syndicalistes arrêtés par les Forces nationales de police (FNP) le 25 septembre 2005, au port de Djibouti ou à leur domicile (cf. rappel des faits), ont été relâchés les 26 et 27 septembre 2005 sans qu’aucune charge ne soit retenue contre eux. Toutefois, 36 d’entre eux, parmi lesquels les dirigeants mentionnés ci-dessus, n’ont pu réintégrer leurs postes en raison de leur licenciement qui leur a été notifié le 24 septembre 2005. A cet égard, chacune de ces personnes prévoit de déposer plainte pour licenciement abusif ; à cette démarche devrait s’ajouter une plainte collective déposée par l’UTP.

Enfin, M. Ali Mohamed Aras, secrétaire général de l’UTP, qui avait également été arrêté le 25 septembre 2005, a également été libéré le 2 octobre, mais placé en pré-retraite.

L’Observatoire remercie toutes les personnes, organisations et institutions qui sont intervenues en faveur de la libérations de ces personnes.

Toutefois, l’Observatoire réitère sa vive préoccupation à l’égard du harcèlement policier et judiciaire dont sont victimes les défenseurs des droits économiques et sociaux à Djibouti, et en particulier les représentants syndicaux. L’Observatoire souligne que ces faits s’inscrivent en violation de la Convention (n°98) sur le droit d’organisation et de négociation collective de l’Organisation internationale du travail, ratifiée par Djibouti en août 1978, ainsi que des dispositions du Pacte international relatif aux droits économiques, sociaux et culturels ratifié par Djibouti en novembre 2002, notamment de son article 7 (droit de jouir de conditions de travail justes et favorables) et de son article 8 (droit de former avec d’autres des syndicats; droit de s’affilier au syndicat de son choix; droit de grève).

Rappel des faits :

Les travailleurs du port de Djibouti avaient observé une grève générale du 14 au 17 septembre 2005, à l’appel des syndicats djiboutiens qui protestaient contre les mauvaises conditions de travail et des licenciements abusifs. Le 17 septembre, une réunion tripartite entre les syndicats, la direction du port et le ministre de l’Emploi avait mis un terme à la grève et jeté les bases d’un dialogue social.

Dans ce cadre, une nouvelle réunion s’était tenue le 24 septembre 2005 au ministère de l’Emploi, en l’absence toutefois du directeur du port et de sa délégation, qui avait déclaré vouloir boycotter le processus de dialogue. Ce même jour, MM. Kamil Mohamed Ali, Ibrahim Moussa Sultan, Mohamed Ahmed Mohamed, Ali Ibrahim Darar, Mohamed Abbdillahi Dirieh, Moustapha Abchir Egueh, Mohamed Abdillai Omar, Mohamed Ahmed Ali, Samira Hassan Mohamed, Koulmiyeh Houssein et Djibril Houssein Awaleh, qui souhaitaient entrer dans la zone portuaire, avaient été appréhendés par des policiers qui leur avaient retiré leur carte d’accès. A 17h30, les 11 syndicalistes s’étaient vus notifier leur licenciement par la direction du port, pour « obstacle à la liberté de travail », en référence à la grève générale du 14 septembre.

En réaction à ces licenciements considérés comme abusifs, les travailleurs du port avaient lancé un nouvel appel à la grève le 24 septembre à 22h00. Deux heures plus tard, 110 grévistes et syndicalistes se trouvant dans le port de Djibouti avaient été arrêtés par les FNP et emmenés au centre de l’école de police de Nagad. Le 25 septembre 2005, d’autres grévistes et syndicalistes avaient été arrêtés par les FNP au port de Djibouti ou à leur domicile. Au total, près de 170 personnes ont été détenues au centre de Nagad et dans les locaux de la police criminelle.

Actions demandées :

Merci d’écrire aux autorités djiboutiennes et de leur demander de :
i. mettre un terme à toute forme de harcèlement et de représailles à l’encontre des dirigeant syndicaux et des syndicalistes, ainsi que de l’ensemble des défenseurs des droits de l’Homme à Djibouti, afin qu’ils puissent mener leur activité de défense des droits de l’Homme librement et sans entrave ;

ii. permettre à MM. Ibrahim Moussa Sultan, Ali Ibrahim Darar, Moustapha Abchir Egueh, Mohamed Ahmed Ali, Koulmiyeh Houssein et Djibril Houssein Awaleh de contester devant une justice impartiale et indépendante la légalité de leur licenciement, afin qu’ils soient dûment réintégrés dans leurs emplois respectifs ;

iii. se conformer aux dispositions de la Déclaration sur les défenseurs des droits de l’Homme adoptée par l’Assemblée générale des Nations unies le 9 décembre 1998, et plus particulièrement à son article 1 qui dispose que « Chacun a le droit, individuellement ou en association avec d’autres, de promouvoir la protection et la réalisation des droits de l’Homme et des libertés fondamentales aux niveau national et international », et son article 11 qui stipule que « chacun a le droit, individuellement ou en association avec d’autres, d’exercer son occupation ou sa profession conformément à la loi » ;

iv. se conformer plus généralement aux dispositions de la Déclaration universelle des droits de l’Homme, et des instruments internationaux et régionaux de protection des droits de l’Homme auxquels Djibouti est partie, notamment le Pacte international relatif aux droits économiques, sociaux et culturels et la Convention n°98 de l’OIT mentionnés ci-dessus.

Adresses :

  • Son Excellence Ismail Omar Guelleh, Président de la République, Palais du Peuple, BP 109, Djibouti Ville, République de Djibouti. Tel / Fax : 00 253 354060 / 47 71.
  • Mohamed Barkat Abdillahi, Ministre de la justice, des affaires pénitentiaires et musulmanes, chargé des droits de l’homme, BP 12, Djibouti Ville. Tel / Fax : 00 253 35 40 21 / 54 20.
  • Houmed Mohamed Dini, Ministre de l’emploi et de la solidarité nationale. Cité ministérielle, BP 155-170, Djibouti Ville, République de Djibouti. Tel / Fax : 00 253 35 72 68.



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Paris - Genève, le 6 octobre 2005

Merci de bien vouloir informer l’Observatoire de toutes actions entreprises en indiquant le code de cet appel.

L’Observatoire, programme de la FIDH et de l’OMCT, a vocation à protéger les défenseurs des droits de l’Homme victimes de violations et à leur apporter une aide aussi concrète que possible.

L’Observatoire a été lauréat 1998 du Prix des Droits de l’Homme de la République Française.

Pour contacter l’Observatoire, appeler La Ligne d’Urgence:
E-mail : observatoire@iprolink.ch
Tel et fax FIDH : + 33 1 43 55 20 11 / 33 1 43 55 18 80
Tel et fax OMCT : +41 22 809 49 39 / 41 22 809 49 29