République démocratique du Congo
07.01.19
Interventions urgentes

Libération de MM. Carbone Beni Wa Beya, Mino Bompomi, Grâce Tshiuza et Cédric Kalonji

APPEL URGENT - L'OBSERVATOIRE

COD 001 / 0118 / OBS 007.7
Libération
République démocratique duCongo
7 janvier 2019

L’Observatoirepour la protection des défenseurs des droits de l’Homme, un partenariat de laFIDH et de l’Organisation mondiale contre la torture (OMCT), a reçu denouvelles informations et vous prie d’intervenir dans la situation suivante en Républiquedémocratique du Congo (RDC).

Nouvellesinformations :

L’Observatoirea été informé de sources fiables de la libération de MM. Carbone Beni WaBeya, chargé de la mobilisation et du déploiement au sein de Filimbi, MinoBompomi, coordinateur de la cellule de Kinshasa, et Grâce Tshiuza etCédric Kalonji, membres du Mouvement Filimbi[1].

Selonles informations reçues, le 25 décembre 2018, MM. Carbone Beni Wa Beya, MinoBomponi, Grâce Tshiuza et Cédric Kalonji ont été libérés après avoir purgé leurpeine, et sont sortis de la prison centrale de Makala à Kinshasa. Ils avaientété arrêtés le 30 décembre 2017 pour « atteinte à la sûreté de l’État »dans le cadre de manifestations pacifiques demandant des électionsprésidentielle, législatives et provinciales d’ici la fin 2017. Après demultiples reports de leur procès, ils avaient finalement été condamnés à 12mois de prison le 23 septembre 2018 (voir rappel des faits).

L’Observatoirese félicite de la libération des quatremilitants de Filimbi et remercie toutes les personnes, organisations etinstitutions qui sont intervenues en leur faveur. Toutefois, l’Observatoirerappelle que MM. Carbone Beni Wa Beya, Mino Bomponi, Grâce Tshiuza et CédricKalonji n’auraient jamais du être détenus et que leur détention étaitarbitraire, car uniquement destinée à sanctionner leurs activités pacifiques dedéfense des droits humains.

L’Observatoirerappelle que cette libération est intervenue à quelques jours de la tenue desélections générales. Initialement prévues pour le 23 décembre 2018, celles-ciont été repoussées au 30 décembre 2018,et au mois de mars 2019 pour les circonscriptions de Beni et Butembo, dans leNord-Kivu, et de Yumbi, dans le Mai-Ndombe, suite à une décision de laCommission électorale nationale indépendante (CENI) du 26 décembre 2018.

L’Observatoireréitère de manière plus générale ses vives inquiétudes quant au contextegénéral d’intimidations et de répression à l’encontre des défenseurs des droitshumains en RDC, et notamment des membres de mouvements citoyens tels que LUCHA,Filimbi et Compte à Rebours[2],mobilisés en faveur de la mise en œuvre de l’Accord politique du 31 décembre2016 et de l’organisation d’électionsgénérales libres, transparentes et crédibles.


Rappel des faits :

Le23 décembre 2017, M. Palmer Kabeya a été arrêté à Kinshasa alors qu’ilpromouvait la participation à la marche pacifique du 31 décembre 2017, etconduit immédiatement à la Détection militaire des activités anti patrie(DEMIAP).

Le 30 décembre 2017, MM. CarboneBeni, Mino Bompomi, Grâce Tshiuza et Cédric Kalonji ont été enlevés à Kinshasapar des miliciens proches du régime congolais, et conduits à l’Inspectionprovinciale de la police de Kinshasa (IPKIN). Ils ont été placés en détentionprovisoire le même jour pour « atteinte à la sûreté de l’État ».

Selon les informations reçues, pendant sa détention, M. Beni aurait ététorturé afin d’obtenir des aveux au sujet de son engagement en faveur de ladémocratie et du réseau de soutien au mouvement Filimbi.

Ces faits se sont produits alors que ces derniers distribuaient des flyers poursensibiliser la population de quartiers populaires de Kinshasa sur les marchespacifiques programmées pour le lendemain, le 31 décembre 2017, à l’appel duComité Laïc de Coordination (CLC), afin de réclamer l’application intégrale del’Accord politique du 31 décembre 2016, censé à l'origine conduire le pays versdes élections présidentielle, législatives et provinciales d’ici la fin 2017.

Le 2 janvier 2018, MM. Carbone Beni et Cédric Kalonji ont été transférésdans les locaux de l’ANR en face de la Primature.

Le 28 février 2018, M. Mino Bompomi et M. Grâce Tshiuza ont été transférésdes locaux de l’ANR en face de la Primature, où ils étaient détenus depuis le 2janvier 2018, vers le quartier général de l’ANR à Kinshasa.

Le 3 avril 2018, M. Palmer Kabeya a été transféré dans les locaux de l’ANRen face de la Primature.

Le 1er mai 2018, M. Carbone Beni a été transféré des locaux de l’ANR versla clinique de Ngaliema à la suite de problèmes d’articulation aggravés par sesconditions de détention et où il a subi une opération de l’appendicite.

Le 9 juin 2018, les cinq défenseurs des droits humains ont été transférés auCentre pénitentiaire et de rééducation de Kinshasa (CPRK) après avoir étéauditionnés pour la première fois le 8 juin 2018 par le Parquet général deKinshasa Gombé en présence de leurs avocats. Depuis la date de leurarrestation, aucun des cinq membres de Filimbi n’avait encore été présentédevant un juge ni n’avait eu accès à son avocat.

Le 19 juin 2018, MM. Carbone Beni, Mino Bompomi, Palmer Kabeya, GrâceTshiuza et Cédric Kalonji ont comparu devant la Chambre du conseil du Tribunalde paix de Kinshasa-Gombé qui examinait la régularité de leur mandat d’arrêtprovisoire, expiré depuis le mercredi 13 juin 2018. La chambre du conseil duTribunal a décidé de régulariser la poursuite de leur détention provisoire enattendant leur jugement.

Le 16 août 2018, lors de l’audience foraine à la prison de Makala, le Ministèrepublic a requis l’application de la peine maximum de trois ans de prison fermecontre les cinq militants de Filimbi, retenant les accusations d’« offenseau chef de l’État », « publications d’écrits subversifs » et« incitation à la désobéissance ». Selon les termes de la loi, letribunal devait rendre son jugement final sous 10 jours, soit avant le 26 août2018.

Le 23 septembre 2018, le Tribunal de paix de Kinshasa Gombé a rendu sonverdict – près d’un mois après le délaifixé par la loi[3]– condamnant MM. Carbone Beni Wa Beya, Mino Bomponi, Grâce Tshiuza et CédricKalonji à 12 mois de prison (y compris les 9 mois déjà servis) pour« atteinte à la sûreté de l’État », et acquittant M. Palmer Kabeya dufait d’un vice de procédure : le procès concernait les personnes arrêtéesle 30 décembre 2017, alors que lui avait été arrêté le 23 décembre 2017.

Actionsrequises :

L’Observatoirevous prie de bien vouloir écrire aux autorités congolaises en leur demandantde :


i. Mettre un terme à toute forme de harcèlement, y compris judiciaire, àl’encontre de l’ensemble des défenseurs des droits humains en RDC ;

ii. Se conformer aux dispositions de laDéclaration sur les défenseurs des droits de l’Homme, adoptée par l’Assembléegénérale des Nations unies le 9 décembre 1998, et plus particulièrement sesarticles 1 et 12.2 ;

iii. Plus généralement, se conformer auxdispositions de la Déclaration universelle des droits de l’Homme et instrumentsrégionaux et internationaux relatifs aux droits humains ratifiés par la RDC.

Adresses :

· S.E M. Joseph Kabila, Président de laRépublique, Fax +243 88 02 120 ;

· M. Bruno Tshibala, Premier Ministre,E-mail : cabinet@primature.cd ;

· M. Alexis Tambwe Mwamba, Ministre de laJustice, Fax : + 243 88 05 521, E-mail : minjustdh@gmail.com ;

· Mme Marie-Ange Mushobekwa, Ministre desdroits humains min-droitshumains@yahoo.fr ;

· M. Flory Kabange Numbi, Procureur Généralde la République ; E-mail : florykan@yahoo.fr, pgr_rdc@yahoo.fr,pgr_rdcongo15@yahoo.com ;

· Mission permanente de la Républiquedémocratique du Congo auprès des Nations unies, E-mail : missionrdc@bluewin.ch,Fax : +41 22 740.16.82 ;

· S.E. M. Dominique Kilufya Kamfwa,Ambassadeur, Ambassade de la République démocratique du Congo à Bruxelles,E-mail : secretariat@ambardc.eu. Fax : + 32.2.213.49.95

Prièred’écrire également aux représentations diplomatiques de la Républiquedémocratique du Congo dans vos pays respectifs.

***
Paris-Genève, le 7 janvier 2019

Mercide bien vouloir informer l’Observatoire de toute action entreprise en indiquantle code de cet appel.

L’Observatoire partenariat de la FIDH etde l’OMCT, a vocation à protéger les défenseurs des droits de l’Homme victimesde violations et à leur apporter une aide aussi concrète que possible. La FIDHet l’OMCT sont membres de ProtectDefenders.eu, le mécanisme de l’Unioneuropéenne pour les défenseurs des droits de l’Homme mis en œuvre par lasociété civile internationale.

Pour contacterl’Observatoire, appeler la ligne d’urgence :

· E-mail : Appeals@fidh-omct.org

· Tel et fax FIDH : 33 1 43 55 25 18 / 33 143 55 18 80

·Tel et fax OMCT :+ 41 22 809 49 39 / 41 22 809 49 29

[1] Filimbi est une plateforme qui vise à encourager lesjeunes Congolais à accomplir pacifiquement et de manière responsable leursdevoirs civiques. Filimbi fait partie du « Front Citoyen 2016 » quiregroupe des organisations de la société civile comme la Voix des sans voix(VSV), l’Asadho et la Ligue des Électeurs (LE), des mouvements citoyens telsque Filimbi, et des opposants politiques, qui s’opposent à tout changement ducadre légal visant à octroyer à l’actuel Président la possibilité de briguer untroisième mandat et militent pour le respect de la Constitution.

[2] Voir par exemple lesAppels urgents de l’Observatoire COD 001 / 0217 / OBS 014 publié le 1er février2017, COD 004 / 0817 / OBS 085.4 publié le 5 décembre 2017, COD 002 / 0218 /OBS 019 publié le 8 février 2018

[3] Le Ministère public a requis 3 ans de prison fermecontre les cinq militants le 16 août 2018. Le tribunal devait rendre sonjugement final dans un délai de 10 jours, avant le 26 août 2018.