Tchad
19.09.12
Interventions urgentes

Condamnation de membres de l'Union des Syndicats du Tchad

APPEL URGENT - L'OBSERVATOIRE

Nouvellesinformations

TCD 002 / 0912 / OBS 083.1

Condamnation / Harcèlement judiciaire

Tchad

19 septembre 2012

L'Observatoire pour la protection des défenseurs des droits de lHomme, programme conjoint de la Fédération internationale des ligues des droits de lHomme (FIDH) et de lOrganisation mondiale contre la torture (OMCT), a reçu de nouvelles informations et vous prie d’intervenir de touteurgence sur la situation suivante au Tchad.

Nouvellesinformations :

LObservatoire a été informé par la Ligue tchadienne des droits de l'homme (LTDH) de la condamnationde membres de l'Union des Syndicats du Tchad (UST), dont MM. FrançoisDjondang, Michel Barka et Younous Mahadjir, respectivementsecrétaire général, président et vice-président de l'UST.

Selon les informationsreçues, le 18 septembre 2012, la Chambre correctionnelle de citation directe duTribunal de première instance de N'Djamena a condamné MM. Djondang, Barka etMahadjir à 18 mois de prison avec sursis et une amende de 1,5 millions defrancs CFA (environ 2 290 euros) pour «incitation à la haine ethnique». Cettecondamnation fait suite à une pétition de l'UST datée du 1er septembre 2012 quiprotestait notamment contre «la cherté de la vie» et «la paupérisation de la population»,imputées à la mauvaise gestion et la corruption des autorités (voir rappel desfaits).

Par ailleurs, avantl'audience, les avocats de la défense ont posé des questions préjudicielles àla Cour suprême demandant la récusation des juges de la chambrecorrectionnelle. En effet, celle-ci ayant fait l'objet d'une recomposition peuavant le procès, la défense a soulevé des craintes quant à l'impartialité desjuges. Le tribunal a néanmoins considéré ces questions préjudicielles commedilatoires et a tenu le procès sans les avocats des trois accusés, qui ontquitté la salle d'audience en signe de contestation. Les avocats ont décidé defaire appel du verdict. Cependant, leurs craintes quant aux conditions dedéroulement du procès en appel subsistent, les chambres de la Cour d'appel deN'Djamena ayant à leur tour été recomposées par ordonnance le 17 septembre2012.

L'Observatoire dénonce vivement la condamnation de MM.Djondang, Barka et Mahadjir ainsi que les conditions dans lesquelles s'est tenuleur procès, en ce qu'il considère que ces actes ne semblent viser qu'àsanctionner leurs activités de défense des droits économiques et sociaux etlimite l'exercice de leur droit à la liberté d'expression. L'Observatoireappelle donc les autorités tchadiennes à abandonner toutes formes de poursuitesarbitraires à l'encontre des leaders de l'UST et, plus généralement, à mettrefin au harcèlement judiciaire à l'encontre de l'ensemble des défenseurs desdroits de l'homme au Tchad.

Rappel des faits[1]:

Le 3 septembre 2012, à20 heures, un représentant du ministre de la Justice s'est rendu au domicile deM. Djondang pour tenter de leconvaincre de se rendre au bureau du ministre. Dans l'après-midi du même jour,le procureur de la République avait convoqué M. Djondang par téléphone afin del'interroger au sujet de la pétition de l'UST datée du 1er septembre 2012.

Le 5 septembre 2012, le Bureau exécutif de l'USTa également reçu une convocation écrite du même procureur de la Républiquevisant notamment MM. François Djondang, Michel Barka et Younous Mahadjir, etrelative à la pétition mentionnée précédemment. Ils ont été auditionnés par lapolice puis par le procureur de la République le 10 septembre. Les troissyndicalistes ont ensuite été inculpés pour «incitation à la haine ethnique» etM. François Djondang est en outre accusé de «diffamation».[2].

Ces multiples inculpationss'inscrivent dans un climat social particulièrement tendu, l'UST étantégalement à l'initiative d'une grève réclamant, depuis le 17 août 2012, l'applicationd'un décret promulgué en novembre 2011 suite à un protocole d'accord portantgrilles salariales dans le secteur public, et conclu entre le Gouvernement,l'UST et la Confédération libre des travailleurs du Tchad (CLTT).

Actions requises:

L’Observatoire vous prie de bien vouloir écrireaux autorités tchadiennes en leur demandant de :

i. Mettre un terme à toute forme de harcèlement - y comprisjudiciaire - à l'encontre de MM.François Djondang, Michel Barka et Younous Mahadjir, ainsi que de l’ensembledes défenseurs des droits de l’Homme au Tchad;

ii. Garantir le plein respect des règles du droit à un procèséquitable dans le procès en appel ainsi que dans toute nouvelle procédureconcernant les trois défenseurs des droits de l'homme;

iii. Se conformer aux dispositions de la Déclaration sur les défenseursdes droits de l’Homme, adoptée par l’Assemblée générale des Nations unies le 9décembre 1998, et plus particulièrement:

- son article 1 quistipule que “chacun a le droit, individuellement ou en association avecd’autres, de promouvoir la protection et la réalisation de tous les droits del’Homme et de toutes les libertés fondamentales aux niveaux national etinternational”;

- son article 6 quistipule que “chacun a le droit, individuellement ou en association avecd'autres: a) De détenir, rechercher, obtenir, recevoir et conserver desinformations sur tous les droits de l'homme et toutes les libertésfondamentales en ayant notamment accès à l'information quant à la manière dontil est donné effet à ces droits et libertés dans le système législatif,judiciaire ou administratif national; b) Conformément aux instrumentsinternationaux relatifs aux droits de l'homme et autres instrumentsinternationaux applicables, de publier, communiquer à autrui ou diffuser librementdes idées, informations et connaissances sur tous les droits de l'homme ettoutes les libertés fondamentales;

- et son article 12.2qui prévoit que « l’Etat prend toutes les mesures nécessaires pour assurer queles autorités compétentes protègent toute personne, individuellement ou enassociation avec d’autres, de toute violence, menace, représailles,discrimination de facto ou de jure, pression ou autre action arbitraire dans lecadre de l’exercice légitime des droits visés dans la présente Déclaration »;

iv. Plus généralement, se conformer aux dispositions de la Déclarationuniverselle des droits de l’Homme et instruments régionaux et internationauxrelatifs aux droits de l’Homme ratifiés par le Tchad.

Adresses :

· M. Idriss Deby,Président de la République, Présidence de la République, BP 74, N’Djamena,République du Tchad.

Email: http://www.presidencetchad.org/nous_ecrire.php#

· M. Amina Kodjiyana,Ministre des Droits de l’Homme, Ministère des Droits de l’Homme, BP 169,N’Djamena, République du Tchad. Email : droittchad@yahoo.fr

· M. Abdoulaye SabreFadoul, Ministre de la Justice, Garde des Sceaux, Ministère de la Justice, BP426, N’Djamena, République du Tchad.

· S.E. M. Malloum BAMANGA ABBAS, Missionpermanente de la République du Tchad auprès de l’Office des Nations Unies àGenève, RueTronchin 14, 1202 Genève, Suisse. Email: mission.tchad@bluewin.ch

Prière d’écrire également aux représentationsdiplomatiques du Tchad dans vos pays respectifs.

***

Paris-Genève, le 19 septembre 2012

Merci de bien vouloir informer lObservatoire de toutes actions entreprises en indiquant le code de cet appel.

LObservatoire, programme de la FIDH et de lOMCT, a vocation à protéger les défenseurs des droits de lHomme victimes de violations et à leur apporter une