Tunisie
22.10.10
Rapports

Rapport de synthèse des missions d’observation judiciaire



COMMUNIQUE DE PRESSE

TUNISIE - 100 jours dedétention pour Fahem Boukaddous, 241 pour Hassan Ben Abdallah : le dossierdu bassin minier n’est pas clos !

Copenhague, Paris, Genève, 22 octobre 2010. Trois années après le début desmouvements de protestation pacifique du bassin minier de Gafsa-Redeyef et lavague de répression qui l’a suivi, le REMDH et l’Observatoire pour laprotection des défenseurs des droits de l’Homme (un programme conjoint de laFIDH et de l’OMCT) constatent que la répression et le harcèlement desdéfenseurs des droits de l’Homme se poursuit dans cette région.

Le journaliste Fahem Boukaddous purge aujourd’huison centième jour de prison pour « diffusion d’information susceptible deporter atteinte aux personnes et à leurs biens » pour avoir couvertces mouvements sociaux pour le compte de plusieurs médias. Le militant syndicalHassan Ben Abdallah est pour sa part détenu depuis le 24 février 2010pour « rébellion » et « association de malfaiteurs ».

Les observateurs mandatés par nos organisations pourobserver le déroulement des procès de Fahem Boukaddous et de Hassan BenAbdallah ont fait état d’une série d’atteintes aux droits de la défense, à lapublicité des débats, au principe du contradictoire et des comportementsattentatoires à la dignité humaine des deux défenseurs imputables aux autoritésjudiciaires tunisiennes. Aucun observateur des états membres de l’UE n’aassisté à ces procès.[1]

Nos organisations s’alarment des conditions de détention deMM. Boukaddous et Ben Abdallah. Hospitalisé à plusieurs reprises ces dernièressemaines du fait de crises d’asthme à répétition, Fahem Boukaddous poursuitdepuis le 8 octobre une grève de la faim illimitée pour dénoncer ses conditionsde détention. Les informations relatives aux conditions de détention de HassanBen Abdallah sont également très inquiétantes. Contraint de dormir à même lesol pendant des mois, il se trouve actuellement dans une cellule surpeupléehébergeant 100 détenus, ce qui ne fait qu’aggraver ses problèmesrespiratoires.

Nos associations considèrent que ces procès ne sont que lapartie visible d’une campagne de harcèlement policier et judiciaireininterrompu à l’encontre des défenseurs des droits de l’Homme, des syndicalistesdu bassin minier, des anciens détenus et de leurs familles. M. Maher Fajraouidemeure sous le coup d’une condamnation à dix ans de prison, alors que M.Mohieddine Cherbib a été condamné par contumace à respectivement deux ans ettrois mois de prison pour avoir animé le mouvement de solidarité avec lapopulation du bassin minier depuis la France. Encore aujourd’hui dans la régiondu bassin minier, de nombreuses personnes continuent de se battre pourretrouver leurs droits et leur dignité, à l’image de Mme Ghezala Mohammedi, engrève de la faim depuis le 14 octobre pour réintégrer le poste de travail dontelle a été abusivement renvoyée en octobre 2008.

Nos organisations demandent aux autorités tunisiennesde :

· Garantiren toutes circonstances l’intégrité physique et psychologique de M. FahemBoukaddous et M. Ben Abdallah ainsi que de l’ensemble des journalistes etdéfenseurs des droits de l'Homme tunisiens;

  • Libérer immédiatement et inconditionnellement Fahem Boukaddous et Hassan Ben Abdallah et arbitrairement détenus et abandonner les charges retenues contre eux garantir en toutes circonstances leurs intégrité physique et psychologique;
  • Mettre un terme à toute forme de menaces et de harcèlement à l’encontre des membres du mouvement de protestation pacifique du bassin minier et leurs familles ainsi qu’à l'ensemble des journalistes et défenseurs des droits de l’Homme tunisiens ;
  • Abandonner les poursuites judiciaires à l’encontre de Maher Fajraoui, condamné à dix ans de prison, et Mouhieddine Cherbib, ex-président de la FTCR, condamné par contumace à deux ans et trois mois de prison, pour avoir animé le mouvement de solidarité avec la population du bassin minier depuis la France ;
  • Se conformer aux dispositions de la Déclaration sur les défenseurs des droits de l’Homme, adoptée par l’Assemblée générale des Nations unies le 9 décembre 1998, et plus particulièrement :

- à sonarticle 1 qui stipule que « chacun a le droit, individuellement ou enassociation avec d’autres, de promouvoir la protection et la réalisation desdroits de l’homme et des libertés fondamentales aux niveaux national etinternational » ;

- à sonarticle 5 b) et c) qui prévoit qu’« afin de promouvoir et protéger lesdroits de l’homme et les libertés fondamentales, chacun a le droit, individuellementou en association avec d’autres, aux niveaux national et international, de seréunir et de se rassembler pacifiquement et de former des organisations,associations ou groupes non gouvernementaux, de s’y affilier et d’y participer;

- à sonarticle 6.b, qui stipule que « chacun a le droit, individuellement ou enassociation avec d’autres [...] conformément aux instruments internationauxrelatifs aux droits de l'Homme et autres instruments internationauxapplicables, de publier, communiquer à autrui ou diffuser librement les idées,informations et connaissances sur tous les droits de l'homme et toutes leslibertés fondamentales » ;

- à sonarticle 12.2 qui prévoit que « l’Etat prend toutes les mesures nécessairespour assurer que les autorités compétentes protègent toute personne,individuellement ou en association avec d’autres, de toute violence, menace,représailles, discrimination de facto ou de jure, pression ou autre actionarbitraire dans le cadre de l’exercice légitime des droits visés dans laprésente Déclaration »;

· Seconformer aux dispositions de la Déclaration universelle des droits de l’Hommeet des instruments régionaux et internationaux relatifs aux droits de l’Hommeratifiés par la Tunisie.

Nos organisations demandent également à l’UE de mettre enœuvre pleinement et de façon visible ses lignes directrices relatives auxdéfenseurs des droits de l’Homme et de conditionner tout renforcement desrelations entre l’Union et la Tunisie à un progrès notable en matière derespect des normes internationales des droits de l'Homme.

Pour plus d’information,merci de contacter :


• FIDH : Karine Appy : + 33 1 43 55 25 18

• OMCT : Seynabou Benga : + 41 22 809 49 39

•REMDH : Shaimaa Abou Elkhir : +45 32 64 17 00


[1] Voir le rapport de synthèse desmissions d’observation judiciaire relatives au procès de Monsieur FahemBoukaddous, journaliste, et de Monsieur Hassan Ben Abdallah, militant syndical

FIDH: /files/2010/10/20902/rapport_tunisie_oct2010.pdf;

OMCT: /files/2010/10/20902/rapport_tunisie_oct2010.pdf;

REMDH: http://fr.euromedrights.org/index.php/news/emhrn_releases/index.1.html