26.06.08
Interventions urgentes

Dans le monde, la pauvreté et la discrimination alimentent le recours à la torture et aux autres formes de violence

La torture est une offense et un outrage contre nous tous, mais c’est souvent les populations les plus pauvres et les plus marginalisées qui subissent son impact le plus direct et brutal. Pour cette raison, la lutte contre la torture dans laquelle s’engage l’OMCT est aussi une lutte contre l’injustice économique et sociale.

Eric Sottas, Secrétaire Général de l’OMCT

Genève, 26 juin 2008. A l’occasion de la Journée Internationale de soutien aux victimes de la Torture, l’OMCT met en exergue le lien qui unit torture et pauvreté. En effet, l’expérience montre que, dans le monde, la majorité des victimes de torture et d’autres formes de violence proviennent des groupes sociaux les plus désavantagés. Les membres des communautés marginalisées ne sont pas seulement plus vulnérables à ces abus, mais aussi les moins à même de revendiquer leurs droits et de chercher protection et réparation. Soutenir les victimes de torture signifie par conséquent donner la parole aux femmes et enfants, aux communautés autochtones, aux pauvres, aux membres des minorités ethniques, raciales et religieuses et à tous celles et ceux qui sont forcés de vivre en marge de la société.

Dans certains cas, les actes de torture et de violence sont conduits par les Etats eux-mêmes dans le but de supprimer la contestation sociale contre les politiques socio-économiques menées ou museler celles et ceux qui cherchent à défendre les droits économiques, sociaux et culturels. Dans d’autres cas, ces actes sont utilisés pour toute opposition aux projets majeurs d’infrastructure, à l’établissement de zones économiques spéciales, à l’autorisation de campements non-autorisés ou à l’exploitation des ressources naturelles. Qui plus est, la torture est perpétrée de plus en plus souvent par les acteurs non-étatiques, tels que les paramilitaires et les groupes armés, les réseaux criminels organisés, des particuliers et des compagnies de sécurité qui protègent certains intérêts économiques, notamment ceux des multinationales actives dans les secteurs de l’exploitation minière ou agro-industriels.

Pour que la torture et les peines ou les traitements cruels, inhumains et dégradants et toute autre forme de violence puissent être éliminés, il faut, en premier lieu, comprendre leurs causes économiques, sociales et culturelles pour, dans un deuxième temps, les aborder de manière efficace. Corollairement, ceci signifie que pour réduire le niveau de violence d’une société donnée, un pas fondamental à franchir est celui d’agir pour assurer la pleine jouissance des droits économiques, sociaux et culturels. Dans le monde, les conflits et le manque de sécurité exposent les citoyens à des situations qui les empêchent d’échapper à la pauvreté, de travailler dans des conditions justes et favorables, d’assurer des soins et une éducation à leurs enfants et de bénéficier d’un niveau de vie suffisant et aux meilleurs standards de santé qui soient.

Pour cette raison, l’engagement de l’OMCT à mettre un terme à la torture implique également de collaborer avec les ONG actives dans le développement. Ainsi, l’OMCT s’engage à répertorier les phénomènes qui créent un contexte propice aux violations des droits de l’Homme, tels que la détérioration du tissu social, la polarisation sociale, l’affaiblissement de la capacité régulatrice de l’Etat et la répression des expressions identitaires linguistiques, culturelles ou religieuses.

L’OMCT appelle la société civile à rester vigilante sur le risque existant que les manifestations de torture ou de violence, directement à l’encontre des couches les plus pauvres et marginalisées de la société, deviennent plus fréquentes au cours de ces prochains mois, compte tenu du contexte d’agitation sociale croissant, provoqué par la hausse globale des prix des denrées alimentaires et l’augmentation de l’insécurité alimentaire. Dans le même temps, il est impératif que les gouvernements reconnaissent et respectent le droit de leurs citoyens à la liberté de manifestation pacifique. Répondre à la protestation sociale, générée par la détérioration du niveau de vie par une répression violente ne peut qu’accroître les tensions sociales et renforcer un contexte de violence. L’OMCT encourage également les gouvernements à prendre les mesures nécessaires, incluant les subventions, voire la distribution d’urgence, afin de minimiser l’impact de la hausse des prix de la nourriture sur les couches les plus pauvres et les plus vulnérables de la société.

Le droit à la manifestation pacifique, le droit au travail, le droit à l’alimentation et à un niveau de vie suffisant sont tous garantis par les instruments régionaux et internationaux. Le climat économique mondial actuel n’offre aucune raison, quelle qu’elle soit, pour justifier l’érosion de ces droits. Ce climat ne devrait également pas servir de prétexte aux Etats pour justifier le manquement à leurs obligations de s’assurer qu’aucun citoyen n’est sujet à la torture et que ceux qui en sont victimes obtiennent réparation, compensation et réhabilitation.

Pour plus d’informations, merci de contacter:
OMCT, Michael Miller : +41 79 743 68 63