Israël et territoires palestiniens occupés
15.07.11
Interventions urgentes

La loi anti-boycott constitue une violation des droits de l’Homme et porte atteinte à la démocratie en Israël - L’UE doit sans équivoque condamner cette loi

La loi anti-boycott constitue une violation des droits de l’Homme et porte atteinte à la démocratie en Israël

L’UE doit sans équivoque condamner cette loi

Bruxelles, le 15 juillet 2011: APRODEV, le Réseau Euro-Méditerranéen des Droits de l’Homme (REMDH), Front Line, l’Observatoire pour la Protection des Défenseurs de Droits de l’Homme – programme conjoint de l’Organisation mondiale contre la Torture (OMCT) et de la Fédération internationale pour les Droits de l’Homme (FIDH) et le Quaker Council for European Affairs tiennent à exprimer leur inquiétude concernant la « Loi pour la prévention des dommages envers l’Etat d’Israël provoqués par un boycott – 2011 » (loi anti-boycott). Cette loi, adoptée le 11 juillet 2011 par la Knesset, par 47 voix contre 38, constitue une nouvelle attaque contre la liberté d’expression et d’association en Israël.

La loi anti-boycott interdit aux organisations et aux citoyens israéliens de participer au « boycott de l’Etat d’Israël », et même, dans certains cas, d’accepter de participer à un boycott. La définition du « boycott de l’Etat d’Israël » ne concerne pas seulement l’Etat d’Israël et ses institutions, mais aussi toute zone qui dépend de son contrôle, ce qui inclut donc les colonies israéliennes des territoires palestiniens occupés (TPO), établies en contravention du droit international.

La loi définit l’appel au boycott de l’Etat d’Israël comme un « dommage civil », qui peut par conséquent entraîner des dommages et intérêts. Toute personne qui en appelle publiquement au boycott risque d’être poursuivie par la cible concernée et condamnée à une amende, même si aucun dommage effectif n’a été causé à la partie menacée d’un boycott.

Cette loi autorise aussi le gouvernement à révoquer les exemptions d’impôts et autres droits et bénéfices dont profitent les personnes ou les groupes israéliens, de même que les institutions académiques, culturelles et scientifiques qui reçoivent une aide de l’Etat, s’ils se prononcent en faveur d’un boycott. Dans un grand nombre de cas, cela signifie pour les institutions concernées qu’elles ne seront plus éligibles pour des aides publiques extérieures, y compris de l’Union européenne, dont une grande partie est largement dépendante.

En outre, les entreprises et les industries israéliennes (y compris les succursales israéliennes des sociétés étrangères) risquent d’être pénalisées par cette loi si elles refusent de traiter avec des entreprises situées dans les colonies (par exemple, si elles signent une clause de ce genre dans un contrat conclu avec des associés palestiniens).

Indépendamment des mérites effectifs de la tactique du boycott, les tentatives faites pour l’empêcher limitent considérablement la liberté d’expression, dans la mesure où elles visent les expressions publiques non violentes d’opposition aux politiques israéliennes. Elles affectent aussi la liberté d’association, dans la mesure où elles exposent les organisations qui s’engageraient dans une campagne publique contre les colonies et autres violations des droits de l’Homme à des sanctions juridiques et financières et à de coûteuses demandes de compensation de la part des organisations des colonies.

Cette nouvelle loi constitue une tentative inacceptable de réduire au silence les organisations de société civile en Israël, et de limiter gravement leurs activités. Elle s’inscrit dans le cadre d’une campagne qui cherche à priver de leur légitimité les activités des organisations de la société civile israélienne, en particulier celles qui défendent les droits humains fondamentaux des Palestiniens dans les TPO et qui dénoncent l’occupation et ses conséquences. La loi viole les traités internationaux relatifs aux droits de l’Homme ratifiés par l’Etat d’Israël, notamment le Pacte international sur les droits civils et politiques, et s’inscrit donc en faux par rapport aux principes fondamentaux de la démocratie.

Nous exprimons notre solidarité et notre ferme soutien aux 53 organisations de société civile en Israël qui ont conjointement signé une lettre adressée au président de la Knesset, M. Reuven Rivlin, en février 2011, pour protester contre cette proposition de loi. C’est la deuxième loi adoptée par la Knesset, en moins de six mois, qui vise à restreindre les activités de la société civile indépendante d’Israël.

Nous saluons avec satisfaction l’inquiétude manifestée dans un premier temps par Madame Ashton, Haut représentant de l’Union européenne. Toutefois, conformément aux directives de l’UE sur les défenseurs des Droits de l’Homme, nous demandons instamment à l’UE et à ses Etats membres :

- De condamner cette loi publiquement et sans équivoque, et d’inviter Israël à la révoquer et à s’abstenir de toute nouvelle législation ou pratique qui tendrait à restreindre les libertés d’association et d’expression en Israël.

- D’utiliser tous les moyens à leur disposition pour défendre et protéger la liberté d’association et d’expression des organisations et des défenseurs des droits de l’Homme en Israël.

- De réitérer avec force, lors de la prochaine réunion du Groupe de travail UE-Israël sur les droits de l’Homme, qui doit se tenir le 13 septembre 2011, leurs inquiétudes quant aux restrictions imposées aux organisations et aux défenseurs des droits de l’Homme.

- De continuer à soutenir financièrement les organisations de société civile en Israël qui défendent ces droits et libertés fondamentaux.