République démocratique du Congo
15.10.13
Interventions urgentes

Préoccupation face au déni de justice subi par 9 défenseurs des droits de l'Homme

Lettre ouverte àMonsieur Jérôme KITOKO KIMPELE,

PremierPrésident de la Cour Suprême de Justice à Kinshasa

Copieà Madame Wivine MUMBA MATIPA,

Ministrede la Justice et des Droits Humains

Copie à Monsieur Flory KABANGE NUMBI,

Procureur Général de la République

Paris - Genève, le 15 octobre 2013

Objet : Préoccupation face au déni dejustice subi par 9 défenseurs des droits de l'Homme

Monsieur le Premier Président,

La Fédération internationale des ligues des droits de l’Homme (FIDH) et l’Organisation mondiale contre la torture (OMCT), dans le cadre deleur programme conjoint, l'Observatoire pour la protection des défenseurs desdroits de l'Homme, souhaitent porter à votre attention la situation de MM. Roger KITAMBALA TAYEYE, Félicien TANZEY, Dwe NTOTOMOSI, EmmanuelKIZUBA NGAMAKI, Théo ENAYEYE TAMPO,René MBOTI BOYI MOKE, MUYEMBE NGATO, Réagan FIMBO KUSABUKA et FreddyKAMBE, membres de l’Association pour la défense des intérêts de la ville deBandundu (ADIVB) et actuellement détenus à la prison deBandundu ville.

Le 26 août 2013, les avocats de ces neufdéfenseurs ont déposé une requête de demande de liberté provisoire, laquelle aété plaidée devant la Cour suprême de justice de Kinshasa et a fait l'objetd'un avis favorable du Ministère Public, avant d’être mise en délibéré.

Aujourd'hui, soit un mois et dix-huit jours plustard, la décision de la Cour n'a toujours pas été rendue publique.L'Observatoire rappelle que selon les termes de l'article 43 de la Loiorganique n°13/011-B portant organisation, fonctionnement et compétences dejuridictions de l'ordre judiciaire, en matière pénale la décision doit êtreprononcée au plus tard dans les dix jours qui suivent la prise en délibéré dudossier et qu’en matière de demande de liberté provisoire la décision doit enprincipe intervenir dans les 24 heures.

L'Observatoire craint que ce retard indu dans leprononcé de la justice ne soit le résultat de pressions exercées en violationdu principe de l'indépendance du système judiciaire. Nos organisations sontd'autant plus préoccupées que les neuf défenseurs sont détenus arbitrairementdepuis le 25 mars 2013, ont subis des mauvais traitements au cours de leurgarde à vue par la police et ont fait l'objet de procès expéditifs tant enpremière instance qu'en appel émaillés de nombreuses violations du droit à unprocès équitable. Ce harcèlement faisant suite à l'exercice légitime deslibertés d'expression et d'opinion, lesquelles sont protégées tant par laConstitution congolaise que par les conventions régionales et internationalesratifiées par la République démocratique du Congo.

L'Observatoire rappelle en effet que ces neuf membres de l’ADIVB ont étécondamnés par la Cour d'appel de Bandundu le 19 avril 2013 à des peines comprisesentre cinq et 12 mois de prison, pour avoir appelé la population à participer àune manifestation pacifique afin de protester contre la majoration des facturesde consommation d’énergie électrique et d’eau. Le 24 août 2013, trois de cesmembres, MM. Fofolo Mukwani, JustinMuyembe et Christian Muzembe,ont été libérés après avoir purgé leur peine de cinq mois de prison ferme.

Au regard de cette situation, l'Observatoires'inquiète fortement des conséquences de cet état de fait et craint que celan'aboutisse à un déni de justice. Nous espérons ainsi que les autoritéscongolaises seront en mesure de corriger cette situation, dans les meilleursdélais.

Nous restons à votre disposition, Monsieur lePremier Président, pour toute information complémentaire. Convaincus que vousserez sensibles à l’urgence de cette demande, nous vous remercions par avancede l’attention particulière que vous y porterez et nous vous prions d’agréernos salutations les meilleures.

Karim LAHIDJI

Président de la FIDH

Gerald STABEROCK

Secrétaire général de l’OMCT