République démocratique du Congo
13.12.04
Interventions urgentes

Congo (RDC) : menace d'arrestation contre M. N'Sii Luanda Shandwe

APPEL URGENT – L’OBSERVATOIRE

Nouvelles informations
RDC 004/0106/OBS 049.04
Menace d’arrestation
République Démocratique du Congo


13 décembre 2004


L’Observatoire pour la protection des défenseurs des droits de l’Homme, programme conjoint de la FIDH et de l’OMCT, vous prie d’intervenir de toute urgence à propos de la situation suivante en République Démocratique du Congo (RDC).


Nouvelles informations :

L’Observatoire a été informé par le Comité des observateurs des droits de l’Homme (CODHO), organisation non gouvernementale dont le rôle est notamment de défendre les personnes incarcérées dans les prisons de Kinshasa, de nouveaux actes de harcèlement à l’encontre de son président, Maître N’Sii Luanda Shandwe.

Selon les informations reçues, lors de l’audience du 3 décembre 2004 de l’affaire “Ministère public contre M. Michel Bisimwa et consorts”, l’Auditeur militaire a déclaré que le Ministère public avait émis une citation à comparaître à l’encontre de M. N’Sii Luanda Shandwe, avocat de M. Bisimwa, poursuivi dans l’affaire de l’assassinat de Laurent-Désiré Kabila. M. Shandwe a été informé que cette citation à comparaître daterait d’août 2003 et qu’elle comporterait la notification de son inculpation pour “trahison”.

Toutefois, le magistrat près la Haute Cour militaire a signifié à certains représentants de la société civile, lors de différents entretiens ayant eu lieu à la suite de cet événement, que la mention de cette citation à comparaître pendant l’audience avait été une erreur et que celle-ci n’était plus d’actualité.

L’Observatoire exprime cependant sa préoccupation au regard de ces faits, qui au vu de la répression subie par M. N’Sii Luanda par le passé (voir rappel des faits), constituent un véritable acte d’intimidation à son encontre.

Par ailleurs, le 28 novembre 2004, M. N’Sii Luanda Shandwe s’est vu empêcher de rendre visite à ses clients en prison. En effet, à la demande de ses clients et dans le cadre de ses visites de routine, M. N’Sii Luanda, accompagné de M. Amato Mbunsu Mahamba, membre du CODHO, s’est rendu au Centre pénitentiaire et de rééducation de Kinshasa (CPRK) le 28 novembre 2004. Le Directeur de la prison, M. Kitungwa Killy Dido, lui a alors signalé qu’il lui était désormais interdit de rendre visite aux pensionnaires du Pavillon 1 (où se trouvent les personnes condamnées dans le cadre du procès de l’assassinat de l’ancien Président Laurent Désiré Kabila) et qu’il devait recevoir ses clients devant le Surveillant en chef de la prison et dans le bureau de celui-ci. Le Directeur refusant de céder sur ce dernier point, M. N’Sii Luanda s’est vu contraint de quitter la prison sans avoir pu s’entretenir avec ses clients.

L’Observatoire souligne que ces événements constituent une entrave aux dispositions de la Déclaration sur les défenseurs des droits de l’Homme, adoptée par l’Assemblée générale des Nations Unies en décembre 1998, notamment à son article 9.3.c, selon lequel “chacun a le droit, d’offrir et prêter une assistance juridique et professionnelle qualifiée ou tout autre conseil et appui pertinents pour la défense des doits de l’Homme et des libertés fondamentales”.

De plus, l’Observatoire réitère sa préoccupation à l’égard des menaces et entraves récurrentes dont sont l’objet les militants des droits humains au seul titre de leur engagement en faveur de la défense des libertés fondamentales en République Démocratique du Congo.


Rappel des faits :

En 2001, M. N’Sii Luanda avait été arbitrairement arrêté et placé en détention du 5 juin au 7 septembre, au motif qu’il aurait été en contact avec des suspects portant atteinte à la sécurité de l’Etat ; aucune charge formelle n’avait été formulée à son encontre. Il avait été libéré par ordonnance de mainlevée du Procureur général de la République. Le 29 octobre, M. N’Sii Luanda avait été interpellé par un agent du CPRK après une visite effectuée dans cette prison conformément au mandat du CODHO. L’agent avait saisi ses documents, notamment tous ceux qui lui avaient été transmis par les détenus, dont une lettre écrite par 12 prévenus adressée au directeur du Bureau des Nations Unies. Le surveillant en chef du CPRK avait, en outre, proféré des menaces à son encontre (Cf. Rapport annuel 2001 de l’Observatoire).

M. N’Sii Luanda Shandwe avait été arrêté une seconde fois le 19 avril 2002, alors qu’il revenait de Genève où il avait assisté à la Commission des droits de l’Homme. Lors d’une perquisition de son domicile sur le motif de trahison, deux inspecteurs de la Cour d’ordre militaire (COM), avaient saisi des documents et emmené M. N’Sii Luanda pour le soumettre à un interrogatoire. Le président du CODHO avait été interrogé sur son organisation, ses activités, son voyage à Genève et ses relations avec M. Bisimwa. Il lui était reproché d’être en contact avec des personnes suspectées de porter atteinte à la sécurité nationale, notamment dans le cadre du procès des auteurs présumés de l’assassinat de l’ancien président Laurent-Désiré Kabila. Détenu neuf mois au CPRK sur ordre de la Commission d’ordre militaire sans qu’aucune charge ne soit prononcée contre lui et sans avoir été auditionné par un tribunal, M. Shandwe n’avait pas bénéficié de soins médicaux appropriés durant sa détention, et avait entamé une grève de la faim de protestation mi-janvier 2003. Il avait été libéré le 26 janvier 2003 sur ordre verbal du Président de la République. Toutefois, M. Shandwe n’a jamais reçu son ordre de libération, restant ainsi exposé à une nouvelle incarcération (Cf. Rapports annuels 2002 et 2003 de l’Observatoire).


Actions demandées :
Merci d’écrire aux autorités de la République Démocratique du Congo, afin de leur demander de :

i. Garantir en toutes circonstances l’intégrité physique et psychologique de M. N’Sii Luanda Shandwe ;

ii. Veiller à ce qu’aucune forme de représailles ne soit entreprise à son encontre, et garantir sa liberté d’action, ainsi que celle de tous les défenseurs des droits de l’Homme en République Démocratique du Congo ;

iii. Se conformer aux dispositions de la Déclaration sur les défenseurs des droits de l’Homme adoptée par l’Assemblée générale des Nations Unies le 9 décembre 1998 “sur le droit et la responsabilité des individus, groupes et organes de la société de promouvoir et de protéger les droits de l’Homme et les libertés fondamentales universellement reconnus” et plus particulièrement à son article 1, qui dispose que “chacun a le droit, individuellement ou en association avec d’autres, de promouvoir la protection et la réalisation des droits de l’Homme et des libertés fondamentales aux niveaux national et international” et l’article 9.3.c sus-mentionné ;

iv. Plus généralement, se conformer aux dispositions de la Déclaration universelle des droits de l’Homme et instruments régionaux et internationaux relatifs aux droits de l’Homme ratifiés par la République démocratique du Congo.


Adresses :
  • Le Président de la République, S.E M. Joseph Kabila, Cabinet du Président de la République, Palais de la Nation, Kinshasa/Gombe, République Démocratique du Congo, Email: upp@ic.cd

  • Le Vice-Président de la République en Charge de la Commission Politique, Défense et Sécurité, M. Azarias Ruberwa Manywa, Cabinet du Vice-Président de la République, avenue roi Baudouin ex-3Z, Kinshasa/Gombe, République Démocratique du Congo, Email : vice_presidence.rdc@ic-cd

  • Le Ministre des Affaires Etrangères et de la Coopération Internationale, M. Ramazani Baya, Cabinet du Ministre, bâtiment du Ministère des Affaires Etrangères, Kinshasa/Gombe, République Démocratique du Congo

  • Le Ministre de la Justice et Garde des Sceaux, M. Kisimba Ngoyi, Ministère de la Justice et Garde des Sceaux, BP 3137, Kinshasa Gombé, République Démocratique du Congo, Fax: 00 243 88 05 521, Email: minjust@yahoo.fr

  • La Ministre des Droits Humains, Mme Marie-Madeleine Kalala, Cabinet du Ministre, Boulevard du 30 juin, Kinshasa/Gombe, République Démocratique du Congo, Fax: 00 243 12 20 664, Email: mindroits_humains@yahoo.fr ou min_droitshumains@yahoo.fr

  • Le Président de l’Observatoire National des Droits de l’Homme (ONDH), M. Innocent-Michel Mpiga Tshibasu, Cabinet du Président, avenue Sendwe, Kinshasa/Kalamu, République Démocratique du Congo

  • Ambassadeur, Mindua Kesia-Mbe, Antoine, Mission permanente de la République démocratique du Congo, Avenue de Budé 18, 1202 Genève, Suisse, e-mail : missionrdc@bluewin.ch, Fax : +4122 740.16.82


Paris - Genève, le 13 décembre 2004

Merci de bien vouloir informer l’Observatoire de toutes actions entreprises en indiquant le code de cet appel.

L’Observatoire, programme de la FIDH et de l’OMCT, a vocation à protéger les défenseurs des droits de l'homme victimes de violations et à leur apporter une aide aussi concrète que possible.
L’'Observatoire a été lauréat 1998 du Prix des Droits de l'Homme de la République Française.

Pour contacter l’Observatoire, appeler La Ligne d’Urgence:
E-mail : observatoire@iprolink.ch
Tel et fax FIDH : + 33 1 43 55 20 11 / 33 1 43 55 18 80
Tel et fax OMCT : +41 22 809 49 39 / 41 22 809 49 29