République démocratique du Congo
07.06.01
Interventions urgentes

'RDCongo

APPEL URGENT – L’OBSERVATOIRE


RDC 006/0108/OBS 071
Tortures / Campagnes d’intimidation
République démocratique du Congo
16 août 2001

L’Observatoire pour la protection des défenseurs des droits de l’Homme, programme conjoint de la FIDH et de l’OMCT, vous prie d’intervenir de toute urgence à propos de la situation suivante en République démocratique du Congo.

Description des faits :

L’Observatoire a été informé d’actes de représailles menés à l’encontre des défenseurs des droits de l’Homme dans les zones contrôlées par les autorités du Rassemblement congolais pour la Démocratie (RCD)/Goma. L’Observatoire a notamment été informé par le Groupe Lotus, organisation de défense des droits de l’Homme basée à Kisangani, de l’interpellation et des actes de torture subis par le Pasteur Claude Olenga Sumaili, Président de la Commission Justice et Paix.

Selon les informations reçues, le 9 août 2001, Claude Olenga a été appréhendé à son bureau, à 12h15, par des agents du Département de la Sécurité et Renseignements (DSR), puis emmené sous escorte à la Direction du DSR. Il a alors reçu plusieurs coups de fouets après avoir été déchaussé et déshabillé, ce qui lui a occasionné des blessures profondes sur les fesses, les cuisses et le dos.

Après avoir été mis au cachot, il a été interrogé sur le contenu de ses émissions à la Radio télévision Amani de l’Archidiocèse de Kisangani, émissions jugées hostiles au RCD. Il a également été interrogé sur la position de la société civile concernant la démilitarisation de Kisangani et sur ses contacts personnels avec Dismas Kitenge Senga, Président du Groupe Lotus, Jean-Pierre Badidike, coordinateur de la SYPA (Synergie pour la Paix), et Monseigneur Monsengo, archevêque de Kisangani. Il a été relâché à 21h00 avec l’ordre formel de ne pas témoigner sur le traitement qu’il avait subi, au risque d’être de nouveau arrêté.

Ces faits s’inscrivent dans un contexte de représailles à l’encontre des militants des droits de l’Homme dans la région de Kisangani, représailles qui prennent la forme de menaces, campagnes d’intimidation et de dénigrement. Il leur est notamment reproché de soutenir la démilitarisation de la ville de Kisangani, telle que recommandée par les résolutions 1304 et 1355 du Conseil de sécurité de l’ONU, de dénoncer auprès de la communauté internationale les violations des droits humains commises dans la Province orientale par le RCD, et de collaborer avec l’antenne de la Mission des Nations Unies au Congo (MONUC)/Kisangani. L’Observatoire rappelle notamment que Dismas Kitenge Senga a été l’objet de menaces et de pressions à la suite d’un entretien avec le Premier ministre belge, lors de la visite de celui-ci à Kisangani, le 1er juillet 2001 ; il a notamment été accusé de trahison et d’espionnage pour le compte de puissances étrangères et du gouvernement de Kinshasa, accusations relayées par la Radio Télévision Congolaise (Cf. Appel urgent RDC 010/0012/OBS 121.01).

L’Observatoire rappelle par ailleurs qu’une vaste campagne de harcèlement et d’intimidation a été menée contre des ONG basées à Uvira, ville également sous contrôle du RCD/Goma, au début du mois d’août 2001. M. Majaliwa Kanazi, coordinateur du « Comité d’action pour le développement intégral » (CADI) a été détenu du 6 au 8 août, pour avoir transmis des documents à la Ligue des droits de la personne dans la région des grands Lacs (LDGL), faisant état des violations de droits de l’Homme perpétrées par les membres du RCD dans la région d’Uvira. De plus, les membres de l’association Elimu (« Science » en swahili) ont été harcelés, accusés d’avoir aidé les Maï Maï à fabriquer des tracts appelant à boycotter le troisième anniversaire du RCD le 3 août 2001, au prétexte que l’association possède un équipement informatique. Madame Gege KATANA BUKURU, militante au sein de l’Elimu a dû se rendre chaque jour, du 6 au 8 août 2001, au Bureau 2 de la Police de Sécurité, de Respect et de Surveillance pour interrogatoire. Son domicile aurait également été perquisitionné. Enfin, les membres de plusieurs organisations, qui avaient pris part à un séminaire organisé par le International Human Rights Law Group et Human Rights Watch en mars 2001, et dont la liste a été trouvée lors d’une perquisition des locaux de l’association ELIMU, ont été convoqués par l’administrateur de la ville d’Uvira dans la semaine du 6 août. La liste aurait été communiquée au poste frontière de Kavimvira (frontière séparant Uvira de Bujumbura) afin d’empêcher les personnes qui y sont mentionnées de circuler entre Uvira et la capitale Burundaise. Elle a maintenant été retirée mais il semblerait que Jules NTEBA, président de l’Elimu et directement accusé d’être à l’origine des tracts, soit contraint de demeurer caché en raison des menaces qui pèsent sur lui.

L’Observatoire, vivement préoccupé par ces faits, souligne que ces actes de représailles s’inscrivent en violation flagrante de la Déclaration sur les défenseurs des droits de l’Homme adoptée par l’Assemblée générale des Nations unies le 9 décembre 1998, qui dispose notamment à son article 6 .b que « chacun a le droit, individuellement ou en association avec d’autres […], de publier, communiquer à autrui ou diffuser librement des idées, informations et connaissances sur tous les droits de l’Homme et toutes les libertés fondamentales ».

Actions demandées :

Merci d’écrire aux autorités du Rassemblement congolais pour la démocratie (RCD)/Goma, afin de leur demander de :

i. garantir la sécurité et l’intégrité physique et psychologique du Pasteur Claude Olenga et de Monsieur Jules NTEBA;

ii. mener une enquête complète et impartiale sur les faits sus-mentionnés, afin d’identifier la ou les personnes responsables, et que celle(s)-ci soi(en)t sanctionnée(s) de manière appropriée;

iii. mettre un terme à toute forme d’intimidation et de harcèlement à l’encontre de toutes les personnes engagées dans la défense des droits de l’Homme, de la démocratie et de la paix ;

ii. se conformer aux dispositions de la déclaration adoptée par l’Assemblée générale des Nations unies le 9 décembre 1998 « sur le droit et la responsabilité des individus, groupes et organes de la société de promouvoir et protéger les droits de l’Homme et les libertés fondamentales universellement reconnus » et plus particulièrement à son article 1° qui dispose que « chacun a le droit, individuellement ou en association avec d’autres, de promouvoir la protection et la réalisation des droits de l’Homme et des libertés fondamentales aux niveaux national et international », ainsi qu’à son article 6.b, sus-mentionné.

iii. se conformer plus généralement aux normes internationales de protection des droits de l’Homme.

Adresses :

- Autorités RCD/Goma
E mail : rcd_congo@yahoo.uk ; rcdcongo@hotmail.com ; moisenyaru@hotmail.com.

Paris - Genève, le 16 août 2001

Merci de bien vouloir informer l'Observatoire de toutes actions entreprises en indiquant le code de cet appel.

L’Observatoire, programme de la FIDH et de l’OMCT, a vocation à protéger les défenseurs des droits de l’Homme victimes de violations et à leur apporter une aide aussi concrète que possible.

L’Observatoire a été lauréat 1998 du prix des Droits de l’Homme de la République Française.

Pour contacter l’Observatoire, appeler La Ligne d’Urgence :
E-mail : observatoire@iprolink.ch
Tel et fax FIDH : + 33 1 43 55 20 11 / 43 55 18 80
Tel et fax OMCT : + 41 22 809 49 39 / 809 49 29