Grèce
28.02.02
Interventions urgentes

Grèce: Expulsions de Communautés Roms en vue des jeux Olympiques de 2004

Genève, le 28 Février 2002


COMMUNIQUE DE PRESSE

LE COMITE INTERNATIONAL OLYMPIQUE ET LES AUTORITES GRECQUES TOLERENT DES EXPULSIONS DE COMMUNAUTES ROMS.

En vue des Jeux Olympiques de 2004 à Athènes, des communautés Roms sont expulsées de leurs habitations. Malgré les condamnations répétées de l’Organisation Mondiale Contre la Torture (OMCT), d’ONG grecques de défense des droits de l’homme, de l’Ombudsman Grec et de la Commission Grecque des Droits de l’Homme, les autorités n’ont, jusqu’à présent, pas pris les mesures nécessaire afin de mettre fin à cette pratique. Le Comité International Olympique a, quant à lui, brillé par son silence.

Dans le cadre de la préparation des Jeux Olympiques de 2004 à Athènes, des communautés Roms résidant dans la région d’Athènes et environs [région d’Aspropyrgos] ont été victimes d’expulsions forcées ou de menaces répétées d’expulsions, et ce depuis le mois de juillet 2000. Ces expulsions sont menées en violation flagrante des procédures légales grecques, de même que des pactes et conventions internationaux de droits de l’homme ratifiés par la Grèce. En lien avec le développement de l’infrastructure des Jeux, et dans le but de construire des installations sportives, les autorités grecques locales ont revendiqué ouvertement divers terrains sur lesquels des familles Roms sont installées ou sont susceptible de s’établir.

Le premier cas d’expulsions forcées, dans une liste qui s’allonge dangereusement, s’est produit le 14 juillet 2000, lorsque les autorités municipales d’Aspropyrgos, équipées d’un bulldozer, sont entrées dans un campement Rom à Aspropyrgos, situé à environ 15 kilomètres d’Athènes. En présence du Maire d’Aspropyrgos et de la police, la majorité des maisons du campement ont été démolies, causant la perte de tous les biens des résidents. L’équipe de démolition, après avoir abattu les maisons, en a brûlé les restes, apparemment dans le but de priver les Roms de tout matériel (majoritairement des planches en bois) pouvant leur permettre de reconstruire un semblant d’abri. Des témoignages recueillis confirment qu’aucun ordre d’expulsion n’a été présenté aux familles et que cette opération a été menée sans autorisation légale préalable, attestant de son illégalité. En effet, dans tout cas de violation de la privauté du domicile, une autorisation préalable du procureur est requise par la loi grecque.

L’action menée par les autorités municipales d’Aspropyrgos a donc mené à l’expulsion forcée de familles Roms de même qu’à la démolition de leurs maisons et biens. Selon différents témoignages, seulement 8 maisons, habitées par des personnes âgées ou malades, ont temporairement été épargnées, puisque leurs habitants ont reçu un ultimatum de 3 jours pour quitter les lieux.

Dans un rapport rendu sur ce dossier, l’Ombudsman grec s’est prononcé sur l’illégalité de ces mesures et a demandé aux autorités compétentes d’imposer des sanction légales. Plus récemment, la Commission Nationale des Droits de l’Homme a reconnu que des expulsions étaient perpétrées dans le cadre de la préparation des Jeux Olympiques de 2004, sous prétexte, parfois erroné, de construire des installation sportives. La Commission a particulièrement insisté sur le fait que la Municipalité d’Aspropyrgos n’a tout simplement pas jugé nécessaire de respecter les procédures légales en matière d’expulsion, arguant à la place que l’opération était destinée à « nettoyer le lieux d’ordures ».

Jusqu’à présent, 19 mois après les faits, aucune enquête n’a été menée, les responsables n’ont pas été traduits devant un tribunal civil compétent et impartial, les sanctions prévues par la loi n’ont pas été appliquées et les victimes n’ont pas été compensées.

Entre temps, la situation des Roms dans la région d’Athènes et environs [région d’Aspropyrgos] est allée se détériorant, d’autres expulsions arbitraires ou menaces d’expulsions ayant lieu. A cet égard, le 13 Septembre 2001, dans un campement Rom adjacent à celui détruit en juillet 2000, les autorités municipales d’Aspropyrgos ont démoli six maisons, avec leur contenu, et endommagé une autre. En partant, les officiels ont menacé les habitants de revenir sous peu. Suite à l’intervention de l’Ombudsman ainsi que d’ONG locales, les autorités municipales n’ont finalement pas « tenu leur promesse ».

Enfin, les autorités locales de Aghia Paraskevi, Ano Liosia, Halandri et [Nea Iona] Marousi ont ouvertement déclaré qu’elles convoitaient les terrains sur lesquels des communautés Roms sont installées ou sont susceptibles de s’établir, et ce afin de construire des installation sportives pour les jeux de 2004. A cet égard, il y a un risque certain que d’autres évictions de communautés Roms, certaines vivant depuis plus de 30 ans sur les lieux convoités, se produisent dans un future proche. C’est le cas notamment de 3 campements de Kaloghreza (Marousi), situé juste à côté du stade olympique.

Le Pacte international relatif aux droits économiques, sociaux et culturels, ratifié par la Grèce, protège en son article 11 le droit à un logement adéquat. Le Comité des Nations Unies des droits économiques, sociaux et culturels, en tant qu’organe de contrôle de la mise en œuvre de cet instrument par les Etats, a précisé que les cas d’expulsions forcées sont, prima facie, incompatibles avec les dispositions du Pacte et ne peuvent être justifiées que dans des circonstances exceptionnelles, en accord avec les principes de droit international. La Coure Européenne des Droits de l’Homme, dans son jugement Selçuk et Asker v. Turkey, a declaré que la destruction de la maison des plaignants constituait une violation de l’article 3 de la Convention Européenne des Droits de l’Homme stipulant que personne ne doit être soumis à la torture ou tout autre traitement cruel, inhumain ou dégradant.

L’Organisation Mondiale contre la Torture (OMCT) regrette fortement que le Comité International Olympique, en tant que co-organisateur des Jeux de 2004, n’ait tout simplement pas pris position par rapport aux cas sus-mentionnés, et ce malgré les appels lancés à sa direction.

En effet, le Comité International Olympique a brillé, jusqu’à présent, par son silence, démontrant dès lors une tolérance tacite et inacceptable des exactions sus-mentionnées. A cet égard, l’OMCT pense que le Comité International Olympique, et son directeur Jacques Rogge, ne peuvent rester indifférents à ces violations, qui, si elles continuent d’être tolérées de la sorte, risquent de ternir l’image et les valeurs du mouvement olympique.


Pour de plus amples informations, veuillez contacter :

Nathalie Mivelaz
Organisation Mondiale Contre la Torture (OMCT)
8, Rue du Vieux-Billard
1211 Genève 8
Tel.: ++41 22 809 49 39
Fax: ++41 22 809 49 29
E-mail: nm@omct.org