Tchad
22.11.06
Interventions urgentes

Actes de harcèlement à l'encontre de M. Evariste Ngaralbaye

TCD 001 / 1106 / OBS 139
Détention arbitraire / Libération /
Poursuites judiciaires
Tchad

22 novembre 2006

L’Observatoire pour la protection des défenseurs des droits de l’Homme, programme conjoint de la Fédération internationale des ligues des droits de l’Homme (FIDH) et de l’Organisation mondiale contre la torture (OMCT) a reçu les informations suivantes et vous prie d’intervenir d’urgence à propos de la situation suivante au Tchad.

Description des faits:

L’Observatoire a été informé par des sources fiables de la détention arbitraire de M. Evariste Ngaralbaye, journaliste à l’hebdomadaire indépendant Notre Temps.

Selon les informations reçues, le 27 octobre 2006, M. Ngaralbaye a été convoqué par la Section nationale de recherches judiciaires (SNRJ) de la gendarmerie, à N’Djaména, où il a été accusé de “diffamation” et “atteinte à l’honneur et au moral des troupes”. Il a immédiatement été placé en détention.

Cette arrestation a fait suite à la parution, le 24 octobre 2006, dans Notre Temps, d’un article de M. Ngaralbaye intitulé “Conflit de l’Est: une guerre inutile”, qui dénonçait l’enrôlement d’enfants-soldats au sein de l’armée tchadienne. Cet article se basait notamment sur les témoignages de parents d’adolescents affirmant que l’armée avait poussé leurs enfants à rejoindre les troupes combattant les rebelles dans l’Est du pays.

Le 31 octobre 2006, M. Ngaralbaye a été remis en liberté pour vice de procédure, son arrestation étant intervenue alors qu’aucune plainte n’avait encore été déposée contre lui. Toutefois, le jour même de sa libération, une plainte a été officiellement introduite par le directeur général de la gendarmerie nationale.

Le 2 novembre 2006, M. Ngaralbaye a été entendu par le Procureur de la République, qui lui a signifié qu’il le contacterait prochainement dans le cadre de cette procédure.

Le 3 novembre 2006 M. Ngaralbaye et son avocat se sont de nouveau rendus au bureau du Procureur afin d’obtenir une copie du dossier, en vue de préparer leur défense. Le Procureur aurait alors affirmé que ce dossier était pour l’heure inexistant. Il n’en reste pas moins que ces faits constituent une menace pour lui.

Cette arrestation s’inscrit dans un contexte de répression accrue à l’encontre des médias indépendants dans le pays. En effet, depuis ces faits, et suite à la proclamation de l’état d’urgence par le président de la République M. Idriss Déby, le 13 novembre 2006, le gouvernement a rétabli un système de censure préalable à l’encontre de la presse écrite indépendante. Depuis le 14 novembre 2006, les journaux privés doivent soumettre leurs maquettes à une cellule spéciale du ministère de la Communication pour obtenir l’autorisation de paraître.

L’Observatoire exprime sa vive préoccupation au regard de ces faits, qui s’inscrivent dans un contexte de harcèlement accru à l’encontre des journalistes dénonçant les violations des droits de l’Homme au Tchad.

L’Observatoire rappelle que M. Ngaralbaye, alors rédacteur en chef et coordinateur des programmes de FM Liberté, une radio créée par des ONG indépendantes de défense des droits de l’Homme, avait reçu de nombreuses menaces de mort en juin et août 2004 (cf. rapport annuel 2004 de l’Observatoire). Par ailleurs, M. Tchanguiz Vatankhah, fondateur et président de l’Association pour la protection de l’environnement et de la nature (APEN), rédacteur en chef de la radio communautaire Radio Brakoss, à Moissala, président de l’Union des radios privées du Tchad (URPT), et réfugié d’origine iranienne installé au Tchad depuis 30 ans, a été détenu au commissariat central de N’Djamena du 28 avril au 19 mai 2006. Il aurait été détenu pour avoir signé, en tant que président de l’URPT, un communiqué de presse en date du 25 avril 2006, dans lequel il sollicitait le report des élections présidentielles prévues le 3 mai 2006 (Cf. communiqués de presse de l’Observatoire, diffusés les 17 et 22 mai 2006).

Actions demandées :

Merci d’écrire aux autorités tchadiennes afin de leur demander de :

  1. Garantir en toutes circonstances l’intégrité physique et psychologique de M. Evariste Ngaralbaye, ainsi que de tous les défenseurs des droits de l’Homme au Tchad ;
  2. Mettre un terme à toute forme de harcèlement à son encontre, ainsi qu’à l’encontre de tous les défenseurs tchadiens des droits de l’Homme ;
  3. Se conformer aux dispositions de la Déclaration sur les défenseurs des droits de l’Homme adoptée par l’Assemblée générale des Nations Unies le 9 décembre 1998 et plus particulièrement à son article 1 qui dispose que “chacun a le droit, individuellement ou en association avec d’autres, de promouvoir la protection et la réalisation des droits de l’Homme et des libertés fondamentales aux niveaux national et international”, son article 6(b), selon lequel “chacun a le droit, individuellement ou en association avec d’autres, conformément aux instruments internationaux relatifs aux droits de l’homme et autres instruments internationaux applicables, de publier, communiquer à autrui ou diffuser librement des idées, informations et connaissances sur tous les droits de l’homme et toutes les libertés fondamentales”, et son article 12.2, qui dispose que “l’Etat prend toutes les mesures nécessaires pour assurer que les autorités compétentes protègent toute personne, individuellement ou en association avec d’autres, de toute violence, menace, représailles, discrimination de facto ou de jure, pression ou autre action arbitraire dans le cadre de l’exercice légitime des droits visés dans la présente Déclaration” ;
  4. Plus généralement, se conformer aux dispositions de la Déclaration universelle des droits de l’Homme et instruments régionaux et internationaux relatifs aux droits de l’Homme ratifiés par le Tchad.

Adresses :

  • M. Idriss Deby, Président de la République, Présidence de la République, B.P. 74 N’Djamena, Tchad, Fax : (235) 51 45 01
  • M. Pascal Yoadimnadji, Premier Ministre, Primature N’Djamena, Tchad, Fax (235) 52 20 89, Email : cpcprimt@intnet.td
  • M. Kalzeubé Payimi Deubet, Ministre Secrétaire général du gouvernement, Chargé des Droits de l’Homme et des relations avec l’Assemblée Nationale, BP 463 N’Djaména ; Tél : (235) 527030
  • M. Abderaman Djasnabaille, Ministre de la Justice, Garde des Sceaux, Ministère de la Justice BP. 426 N’Djaménal, Tchad, Tél. : (235) 52.21.72/522139 ; Fax :(235) 522484 ; Email : justice@intnet.td
  • M. Routouang Yoma Golom, Ministre de l’Immigration et de la Sécurité Publique, BP. 742 N’Djaména, Tchad, Tel/Fax : (235) 51 71 59
  • M. Hourmadji Moussa Doumngor, Ministre de la Communication, porte-parole du Gouvernement, Ministère de la Communication, 892 N’Djaména, Tchad, Tél : (235) 52.40.97; Fax :(235) 52.65.60 ; E-mail : ministere.cab@intnet.td
  • Ambassadeur M. Malloum Bamanga Abbas, Mission permanente de la République du Tchad auprès de l’Office des Nations unies à Genève, rue Tronchin 14, 1202 Genève, Suisse, E-mail : mission.tchad@bluewin.ch, Fax : +41 22 774 25 27
  • Ambassadeur M. Ahmat Abderaman Haggar, Ambassade du Tchad en Belgique, 52 bd. Lambermont, 1030 Schaerbeek, Belgique, Fax: + 32 2.216.35.26, Email: ambassade.tchad@chello.be

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Genève - Paris, le 22 novembre 2006

Merci de bien vouloir informer l’Observatoire de toutes actions entreprises en indiquant le code de cet appel.

L’Observatoire, programme de la FIDH et de l’OMCT, a vocation à protéger les défenseurs des droits de l’homme victimes de violations et à leur apporter une aide aussi concrète que possible.

L’Observatoire a été lauréat 1998 du Prix des Droits de l’Homme de la République Française.

Pour contacter l’Observatoire, appeler La Ligne d’Urgence:
E-mail : Appeals@fidh-omct.org
Tel et fax FIDH : + 33 1 43 55 20 11 / 33 1 43 55 18 80
Tel et fax OMCT : +41 22 809 49 39 / 41 22 809 49 29