Israël et territoires palestiniens occupés
31.05.02
Interventions urgentes

Israël: des enfants palestiniens maltraités et torturés en détention

EXACTIONS ENFANTS
Cas ISR 050401.2 EE
Suivi du cas ISR 050401.CC
Torture et autres peines ou traitements cruels, inhumains ou dégradants en détention


Le Secrétariat international de l’OMCT requiert DE TOUTE URGENCE votre intervention dans la situation suivante en Israël.

Brève description de la situation

Le Secrétariat international de l'OMCT a été informé par DCI, section Palestine (DCI/PS), une organisation membre du réseau de l’OMCT, que des détenus, y compris des enfants, sont encore soumis à des actes de torture et autres mauvais traitements dans les centres de détention en Israël. Ces abus comprennent : être menotté et avoir les yeux bandés pendant de longues heures, être privé gravement, voire totalement, de nourriture, n’avoir accès à aucun traitement médical, être forcé de dormir dehors avec une insuffisance ou une absence totale de literie, et subir régulièrement des violences psychologiques et physiques. Dans les cas où ils sont relâchés, les détenus sont emmenés dans des régions de la périphérie au milieu de la nuit où ils sont abandonnés dans des situations dangereuses sans aucun moyen pour rentrer.

Les enfants palestiniens sont surtout détenus dans trois principales prisons en Israël ; l’une d’entre elle, la prison de Megiddo, est placée sous l’administration des forces militaires israéliennes ; les deux autres, les prisons de Telmond et Ramle (Neve Tertze), sous l’administration de l’Autorité carcérale israélienne. Les garçons palestiniens qui ont atteint l’âge de 16 ans au moment de leur arrestation sont détenus dans la prison de Megiddo et traités comme des détenus adultes. Ceux qui n’ont pas atteint l’âge de 16 ans au moment de leur arrestation sont détenus dans la prison de Telmond. Les filles palestiniennes sont détenues dans la prison pour femmes de Ramle (Neve Tertze).

La prison de Megiddo

A l’heure actuelle, il y a 870 détenus dans la prison de Megiddo, y compris 100 enfants approximativement. Selon DCI/PS, le principal problème que rencontrent ces enfants est la tentative par les services de renseignements israélien de recruter parmi eux des collaborateurs de l’armée israélienne en échange d’une réduction de leur peine. De nombreux enfants palestiniens détenus ont aussi allégué avoir subi des pressions physiques et psychologiques pour qu’ils collaborent avec les autorités israéliennes.

Les trois enfants suivants ont aussi fourni les témoignages suivants à l’avocat de DCI/PS :

Sultan Abdul Jabber Maadi, 16 ans, a été arrêté le 20 mars 2002 à 12 heures 30 chez lui. Il a été transféré de sa maison au centre de détention de Etzion situé dans la colonie israélienne de Gush Etzion et a été accusé de jeter des pierres. Sultan a rapporté que ces interrogateurs lui ont lié mains et jambes, lui ont bandé les yeux et l’ont frappé au niveau de la poitrine. Les coups ont continué de manière répétitive pendant tout l’interrogatoire qui a duré 24 heures. A la fin, Sultan a avoué avoir jeté des pierres sur les soldats. Il a rapporté qu’un soldat lui a présenté une déclaration écrite sous serment qui affirmait que Sultan lui avait jeté des pierres.

A la fin de l’interrogatoire, il a été emmené dans une minuscule cellule d’isolement de 2mx2m à Etzion et y a été enfermé pour 16 jours. Il a ensuite été transféré à la prison de Megiddo. Il n’a pas été autorisé à recevoir des visites de sa famille. Parce qu’il manquait d’habits, il a été obligé d’emprunter des habits à des co-détenus. Il a aussi rapporté que la Croix Rouge ne lui avait pas encore rendu visite.

Jafaar Rasmi Ali Al Asmar, 17 ans, a été arrêté le 9 janvier 2002 à 15 heures 30. Il a été emmené dans la colonie de Maale Adumim et a été accusé d’avoir jeté un cocktail Molotov sur une jeep militaire. Jafaar a rapporté avoir eu les mains liées et avoir été battu sur les jambes et le ventre par les policiers et les interrogateurs. L’interrogatoire dura jusqu’à 9 heures du matin. Jafaar a confessé et signé une déclaration rédigée en Hébreu. Le même jour, il a été emmené à la prison de Etzion et placé dans une cellule d’isolement de 2mx2m pendant un mois puis transféré à Megiddo. Il n’a pas été autorisé à recevoir de visites de sa famille et n’a pas eu suffisamment d’habits. Il ne sait toujours pas quand il sera amené devant un tribunal.

Qassem Farid Abu Awda Jaber, 17 ans, a été arrêté le 25 mai 2001 dans la rue Shalaa à Hébron à 10 heures. Il a été arrêté et accusé d’avoir jeté un cocktail Molotov sur des soldats israéliens. Pendant l’interrogatoire, les soldats israéliens l’ont giflé sur le visage et lui ont lié les mains. Il a toutefois refusé de confesser les actes dont il était accusé. Trois soldats ont déclaré l’avoir vu leur jeter le cocktail Molotov.

Ils l’ont transporté à la prison de Majnouna. En chemin, ils l’ont sévèrement battu sur le ventre et le dos, et lui ont tiré les cheveux. Il est resté à la prison Majnouna pendant 21 jours et a été ensuite transféré à Megiddo. Qassem rapporte qu’il n’a reçu aucune visite de sa famille depuis août 2001 étant donné que l’administration de la prison a interdit toutes visites. La Croix Rouge lui a rendu deux fois visite et lui a fourni quelques vêtements. Il manque cependant toujours d’habits adéquats.

La prison de Telmond

Selon, DCI/PS, 67 enfants palestiniens sont à l’heure actuelle détenus dans la section conjointe 7 et 8 de la prison de Telmond, et 15-20 d’entre eux sont détenus avec les prisonniers criminels mineurs israéliens dans une autre section. Suite à la visite de la prison par un avocat, DCI/PS a souligné les conditions déplorables de détention suivantes (voir les cas ISR 270901.CC, ISR 270901.1 CC de l’OMCT) :

· Trois prisonniers sont détenus dans des cellules de 2mx2m, qui contiennent des toilettes. L’un des prisonniers est obligé de dormir à même le sol et la literie est inadéquate.
· Les cellules ont des petites fenêtres recouvertes de grilles en fer. Il n’y a donc aucun courant d’air dans les cellules, ce qui est particulièrement pénible l’été.
· Les visites des familles ne sont pas permises, ce qui signifie que les prisonniers ne reçoivent pas d’argent pour acheter des réserves à la cantine. Ils ne peuvent pas non plus recevoir de vêtements.



La prison de Ramle

A l’heure actuelle, quatre filles palestiniennes sont détenues à la prison de Ramle (Neve Tertze). Ces filles sont détenues avec d’autres prisonnières politiques palestiniennes et sont soumises à des formes de torture et de mauvais traitements similaires à celles de la prison de Telmond. Les noms des quatre filles sont : Asma Mahmoud, de Tulkarem, 16 ans ; Nisreen Abu Zeina, Tulkarem, 17 ans ; Fidaa’ Ghannam, Hebron, 14 ans ; et Rabaa’ Hamael, 14 ans (voir les cas ISR 111001.VAW/CC, ISR 111001.1.VAW/CC, ISR 230701.CC, ISR 23070101.CC de l’OMCT). DCI/PS continue de représenter Su’ad Ghazal, 18 ans, du village de Sebastia, qui a été arrêtée lorsqu’elle avait 15 ans. Elle est toujours incarcérée à Ramle (Cas ISR 251199.CC, ISR 251199.1.2.3.4 et 5.CC).

Informations générales concernant les dispositions législatives israéliennes interdisant l’utilisation de la torture contre les détenus

Le 6 septembre 1999, la Haute Cour de justice israélienne a rendu un jugement qualifiant d’illégales un certain nombre de méthodes d’interrogation, qui semblait être autorisées et utilisées fréquemment par les Services Généraux de Sécurité (SGS) maintenant connus comme l’Agence de la sécurité israélienne (ASI). Ces méthodes comprennent : 1) maintenir la personne interrogée attachée, dans des positions très pénibles, 2) lui recouvrir la tête d'une cagoule dans des conditions spéciales, 3) lui infliger des volumes sonores excessifs durant de longues périodes, 4) la priver de sommeil durant de longues périodes, 5) proférer des menaces, notamment des menaces de mort, 6) la secouer violemment, et 7) l'exposer à de l'air glacial.

Il doit être relevé que, selon les informations reçues, la plupart des actes de torture ne sont plus appliqués à l’heure actuelle par l’ASI, mais plutôt par la police israélienne, les soldats et la police militaire dans des centres de détention situés dans les colonies et les camps militaires israéliens. Les enfants palestiniens sont soumis à la torture et à des traitements cruels, inhumains et dégradants par les trois groupes mentionnés plus haut.

Des rapports initiaux suggéraient la diminution ou l’arrêt de l’utilisation de la torture dans les jours qui suivirent immédiatement le jugement émis par la Haute Cour. Cependant, les rapports suivants indiquèrent une reprise de l’emploi de la torture et autres mauvais traitements, actes qui sont devenus plus intense à la suite du soulèvement palestinien (Intifada) initié en septembre 2000. Les enfants détenus n’ont pas représenté une exception à cette règle.

L’OMCT est gravement préoccupée par l’intégrité physique et psychologique des enfants palestiniens, et particulièrement ceux qui se trouvent actuellement en détention. L’OMCT rappelle que la Convention relative aux droits de l’enfant, à laquelle Israël est partie, déclare que les Etats doivent veiller à ce que “nul enfant ne soit soumis à la torture ni à des peines ou traitements cruels, inhumains ou dégradants”. Elle ajoute que “tout enfant privé de liberté sera séparé des adultes, à moins que l'on estime préférable de ne pas le faire dans l'intérêt supérieur de l'enfant”.


Action requise

Nous vous prions de bien vouloir écrire aux autorités d’Israël, leur demandant:

i. de mettre immédiatement fin à toute forme de torture et de traitement cruel, inhumain ou dégradant conformément à la législation nationale et internationale;
ii. de prendre toutes les mesures nécessaires afin de garantir l’intégrité physique et psychologique de tous les enfants palestiniens détenus en Israël;
iii. de placer les enfants (toute personne de moins de 18 ans) dans des sections séparées des criminels et des prisonniers adultes, sauf lorsqu’il est dans l’intérêt supérieur de l’enfant de les détenir ensemble;
iv. de garantir une enquête immédiate sur les allégations de recours illégal à des méthodes d'interrogations et de mauvais traitements sur les enfants, d’identifier les responsables, de les traduire devant un tribunal civil compétent et impartial et d’appliquer les sanctions pénales, civiles et/ou administratives prévues par la loi;
v. de garantir le respect des droits de l’homme et des libertés fondamentales de tous les enfants dans tout le pays, conformément aux lois nationales et normes internationales, et plus particulièrement à la Convention relative aux droits de l’enfant.

Adresses

· Ariel Sharon, Prime Minister, Office of the Prime Minister, 3 Kaplan Street, Jerusalem 91007, Israel. Fax:(+ 972 2) 651 2631/566 48 38 / 691 79 15
· Meir Shitrit, Minister of Justice, Ministry of Justice, 29 Salah al-Din Street, Jerusalem 91029, State of Israel. Fax: (+ 972 2) 62 8 54 38 or + 972 2 628 8618
· Eli Yishai, Minister of the Interior, Ministry of the Interior, Fax: 00972 2 670 1411
· Shimon Peres, Minister of Foreign Affairs, Ministry of Foreign Affairs, Fax:(+ 972 2) 530 3704, E-mail: sar@mofa.gov.il
· The Supreme Court of Justice, Kiryat Ben Gurion, Jerusalem, Israel. Fax: (+ 972 2) 652 71 18
· Chief Military Attorney, Brigadier Menahem Finkelstein, Lishkat HaPatzar, HaKirya, Tel Aviv, Fax: (+972 3) 569 20 94

Veuillez aussi écrire aux représentations diplomatiques d’Israël dans vos pays respectifs.

Genève, le 31 mai 2002

Veuillez nous informer de toute action entreprise en citant le code de cet appel dans votre réponse.