Mexique
04.11.09
Interventions urgentes

M. Jacobo Silva Nogales et Mme Gloria Arenas Agis ont été libérés_Allégations de torture et autres mauvais traitements

Cas MEX 050602.3_FR
Suivi des cas MEX 0500602, MEX 0500602.1 y MEX 0500602.2
Mises en liberté

Genève, le 4 novembre 2009

Le Secrétariat International de l’Organisation Mondiale Contre la Torture (OMCT) a reçu de nouvelles informations concernant la situation suivante au Mexique.

Nouvelles informations

Le Secrétariat International de l’OMCT a été informé par des sources fiables, parmi lesquelles Antenna Internationale, une organisation membre du réseau SOS-Torture de l’OMCT, au sujet de la libération de Mme Gloria Arenas Agís et de celle de M. Jacobo Silva Nogales. Ceux-ci avaient été arrêtés en octobre 1999, et l'OMCT avait émis des actions les concernant, en raison de violations des droits de l'Homme, incluant des allégations de torture et de mauvais traitements[1], dont ils avaient été victimes.

Selon les informations reçues, Mme Gloria Arenas Agís et M. Jacobo Silva Nogales ont été remis en liberté, respectivement le 28 octobre 2009 et le 29 octobre 2009, après avoir passé dix ans en prison purgeant une peine, selon les dénonciations injustes, d'environ 50 ans. Leur libération a eu lieu suite à une décision (amparo) de la justice fédérale en leur faveur après avoir été détenus durant dix ans.

En effet, le 23 septembre 2009, la Première Salle de la Cour suprême de justice de la nation a décidé en faveur de Mme Gloria Arenas Agís et de M. Jacobo Silva Nogales sur le recours déposé contre la décision rendue par le Deuxième tribunal collégial en matière pénale et administrative du vingt-et-unième circuit. En février 2008, ce tribunal les avait acquittés des délits d'homicide mais il avait reconfirmé les charges de rébellion à leur encontre. Il a été signalé que, selon les dénonciations, les magistrats avaient augmenté, de façon arbitraire, leur condamnation pour actes de rébellion jusqu'à 14 ans et 2 mois, dans le but de les garder en détention. Pour cette raison, M. Jacobo Silva Nogales avait introduit un recours en amparo en argumentant que le tribunal avait excédé ses attributions et les avait condamnés deux fois pour le même délit.

Sur la base de ce recours approuvé à l'unanimité le 23 septembre 2009, le tribunal a du rendre une nouvelle sentence en tenant compte des années que Mme Gloria Arena Agís et M. Jacobo Silva Nogales ont passé en prison, afin de modifier la peine imposée, en raison de la peine déjà purgée.

Le Secrétariat International de l’OMCT salue la libération de M. Jacobo Silva Nogales et de Mme Gloria Arenas Agís, cependant, il demeure préoccupé concernant la situation légale des personnes qui sont toujours détenues au Mexique, et concernant le besoin de garantir une enquête immédiate, exhaustive, indépendante, effective et impartiale sur chacune de ces allégations de torture ou/et de mauvais traitements.

A cet égard, l'OMCT rappelle que l'article 7 du Pacte international relatif aux droits civils et politiques (PIDCP), pacte auquel le Mexique est un Etat partie, stipule que: "Nul ne sera soumis à la torture ni à des peines ou traitements cruels, inhumains et dégradants", et l'article 11 de la Convention contre la torture, dont le Mexique est aussi un Etat partie, signale que: "Tout Etat partie exerce une surveillance systématique sur les règles, instructions, méthodes et pratiques d'interrogatoire, et sur les dispositions concernant la garde et le traitement des personnes arrêtées, détenues ou emprisonnées de quelque façon que ce soit sur tout territoire sous sa juridiction, en vue d'éviter tout cas de torture".

Contexte et antécédents de la situation

L'OMCT rappelle que M. Jacobo Silva Nogales et Mme Gloria Arenas Agís ont été arrêtés respectivement le 19 et le 22 octobre 1999, dans le district fédéral et à San Luis Potosí. Les détentions ont eu lieu au milieu d’une opération à laquelle ont participé le Procureur général de la République (Procuraduría General de la República, PGR), la Police fédérale de prévention (Policía Federal Preventiva, PFP) et le Centre d'investigation et de sécurité nationale (el Centro de Investigaciones y Seguridad Nacional (CISEN). M. Jacobo Silva Nogales, porté disparu durant cinq jours, et Mme Gloria Arenas Agís, portée disparue durant deux jours, ont été détenus postérieurement durant plusieurs jours au secret; d'après les dénonciations, ils auraient été torturés[2] durant tout ce temps, et auraient été obligés à signer ou à marquer de leurs empruntes digitales une déclaration qui avait été rédigée au préalable.

Les deux détenus, qui à cette occasion avaient reconnu être des membres du groupe armé de l'opposition "L'Armé révolutionnaire du peuple insurgé" ("Ejército Revolucionario del Pueblo Insurgente", ERPI), ont été accusés d'avoir participé à un affrontement entre un autre groupe, l'Armée populaire révolutionnaire (el Ejército Popular Revolucionario,EPR) et l'armée mexicaine (el Ejército regular Mexicano) qui s’est produit le 16 juin 1996 sur la route de Tixtla-Chilapa (qui se trouve entre la localité de "El Ahuejote" et celle de "la Estacada", dans l'Etat de Guerrero). Un camionneur déménageur est décédé à cause de balles perdues et deux militaires ont été blessés à la suite de cet affrontement.

Sur la base de ces faits, ils ont été accusés des délits suivants: homicide qualifié, tentative d'homicide qualifié, rébellion et dommage à la propriété d'autrui. Suite à un procès dénoncé comme injuste et qui a duré trois ans, pendant lequel ses garanties constitutionnelles et ses droits fondamentaux ont été violées à plusieurs reprises, M. Jacobo Silva Nogales a été condamné à une peine de prison de 49 ans, 11 mois et 29 jours, dans la prison de sécurité maximale (Penal de Máxima Seguridad) de La Palma, à Almoloya. En effet, il était considéré, selon le jugement rendu par les autorités, comme une personne très dangereuse mettant la société en danger. Pour sa part, Mme Gloria Arenas Agís a été amenée au centre de réadaptation social de Neza-Bordo (Centro de Readaptación Social de Neza-Bordo), dans l'Etat du Mexique.

Cependant, en 2003, le Premier tribunal unitaire (Primer Tribunal Unitario) du vingt-et-unième circuit, qui a son siège à Chilpancingo dans l’Etat de Guerrero, a modifié la condamnation à 21 ans pour homicide qualifié, 20 ans pour tentative d'homicide qualifié, cinq ans pour rébellion et trois mois pour dommage à la propriété d'autrui. A cette occasion, ils ont été condamnés à 46 ans et deux mois d'emprisonnement. Ceci fût contesté par les détenus qui, après une longue bataille judiciaire, ont gagné le recours.

L'OMCT a exprimé sa vive préoccupation à plusieurs occasions concernant la situation de M. Jacobo Silva Nogales. En juin 2005, l'OMCT avait dénoncé les violations suivantes des droits fondamentaux de M. Jacobo Silva Nogales en tant que détenu et que personne[3]:

  • il restait 23 heures et demi de la journée dans sa cellule (il pouvait sortir dans la cour que durant une demi-heure)
  • toutes ses affaires lui ont été confisquées. De plus, les visites de sa famille ont été suspendues durant deux semaines, et celles des avocats et des personnes de confiance ont été suspendues durant deux mois.
  • Il était soumis quotidiennement à des fouilles corporelles dénigrantes qui consistaient à baisser le pantalon et le caleçon jusqu'au sol, et à certaines occasions il devait se pencher et écarter ses fesses.
  • Il ne recevait aucune attention médicale ni de médicaments lorsqu'il en faisait la demande.

Actions requises

Merci d’écrire aux autorités du Mexique, afin de leur demander de:

  1. Garantir une enquête immédiate, exhaustive, indépendante, efficace, et impartiale sur ces évènements, en particulier les allégations de mauvais traitements et de torture infligés à Mme Gloria Arenas Agís et à M. Jacobo Silva Nogales lors de leur arrestation et durant leur détention, dont les conclusions devront être rendues publiques, et ce afin d’identifier les responsables, de les traduire devant un tribunal indépendant, compétent et impartial et d’appliquer les sanctions pénales, civiles et/ou administratives prévues par la loi ;
  2. Garantir une réparation adéquate à Mme Gloria Arenas Agís et à M. Jacobo Silva Nogales;
  3. Garantir le respect des droits de l’homme et des libertés fondamentales conformément au droit international relatif aux droits de l’Homme, et notamment avec les dispositions de la Convention américaine relatives aux droits de l'Homme, le Pacte international relatif aux droits civils et politiques et la Convention contre la torture, instruments ratifiés par le Mexique.

Adresses

  • Misión Permanente de México ante las Naciones Unidas en Ginebra, 16, Avenue du Budé. 1202, Ginebra, Case postale 433. FAX: + 41 22 748 07 08 E-mail: mission.mexico@ties.itu.int;
  • Señor Presidente Felipe de Jesús Calderón Hinojosa, Residencia Oficial de los Pinos, Casa Miguel Alemán, Col. San Miguel Chapultepec, C.P. 11850, México DF. Tel.: +52 5527891100 FAX: +52 55527 72 376 + 52 55 27 89 11 13 E-mail: felipe.calderon@presidencia.gob.mx
  • Licenciado Fernando Francisco Gómez-Mont Urueta, Secretario de Gobernación, Bucareli 99, 1er. piso, Col. Juárez, Delegación Cuauhtémoc, México D.F., C.P. 06600, México, Fax: +52 (55) 5093 3414 E-mail: secretario@segob.gob.mx
  • Licenciado Mauricio E. Montes de Oca Durán, Unidad para la promoción y defensa de los derechos humanos SEGOB. E-mail: mmontesdeoca@segob.gob.mx
  • Licenciado Daniel Francisco Cabeza de Vaca Hernández, Subsecretaría de Asuntos Jurídicos y Derechos Humanos, E-mail: dcabeza@segob.gob.mx
  • Dr. José Luis Soberanes Fernández, Presidente de la Comisión Nacional de Derechos Humanos. E-mail: correo@cndh.org.mx
  • Sra. Sandra Camila Fuentes Berain Villenave, Embajadora de México en las Comunidades Europeas, y Observadora Permanente de México ante el Consejo de Europa 94 Avenue F.D. Roosevelt, 1050 Bruselas, Bélgica. FAX: +32 2 644 08 19. Tel. + 32 2 629 07 77; E-mail: embamex@embamex.eu

Prière d’écrire aux représentations diplomatiques du Mexique dans vos pays respectifs.

Genève, le 04 novembre 2009

Veuillez nous informer de toute action entreprise en citant le code de cet appel dans votre réponse.

[1] L‘OMCT rappelle que M. Jacobo Silva Nogales, Mme Gloria Arenas Agis, et d'autres détenus solidaires à leur situation ont fait des grèves de la faim à plusieurs reprises. C'était leur unique recours pour défendre leurs droits et pour lutter en faveur de l'amélioration des conditions de vie dans la prison. En effet, l’OMCT avait été informé de la sérieuse préoccupation existante concernant l'intégrité physique et psychologique des prisonniers politiques M. Jacobo Silva Nogales et son épouse Mme Gloria Arenas Agis, enfermés respectivement dans la prison de La Palma (Penal de La Palma) à Almoloya, et dans le centre de réadaptation social de Neza Bordo à cause de leur grève de la faim qui était en cours en juin 2002; voir l'appel urgent de l'OMCT MEX 050602, émis le 5 juin 2002, et voir aussi le suivi de cet appel MEX 050602.1 émis le 24 juin 2002, ainsi que les antécédents de la situation, ci-dessous.

[2] Bien que M. Jacobo Silva Nogales et son épouse Gloria Arenas Agís aient reconnu faire partie du groupe de l'Armé révolutionnaire du peuple insurgé (Ejército Revolucionario Insurgente del Pueblo, ERPI), il a été dénoncé que les accusations et les charges à leur encontre, se basaient sur des confessions arrachées sous la torture. Voir Appel Urgent de l'OMCT MEX 050602, émis le 5 juin 2002, et voir aussi le suivi MEX 050602.1, émis le 24 juin 2002.

[3] Voir suivi de l'appel urgent: MEX 050602.2, émis le 10 juin 2005.