Gabon
24.10.25
Déclarations

Gabon : Appel du Groupe d’Intervention Judiciaire SOS Torture en Afrique (GIJ) pour la mise en place effective du Mécanisme National de Prévention de la torture

Lomé - Genève le 24 octobre 2025


A la veille de la mise en place d’une nouvelle législature au Gabon, le GIJ fait un appel aux futurs députés gabonais afin de doter le Gabon de nouvelles institutions de droits humains fortes et crédibles.

Dans un contexte de renouveau politique dans lequel les gabonais aspirent à plus de justice et de consécration de l’Etat de droit, les futurs députés ont la lourde responsabilité de veiller à la réorganisation de la Commission Nationale des Droits de l’Homme (CNDH) et à la mise en place du Mécanisme National de la Prévention de la Torture (MNP) conformément aux engagements internationaux du Gabon.

La CNDH, une institution d’appui à la démocratie et garante de l’État de droit

La CNDH n’est pas seulement une institution administrative dans l’ordonnancement organique d’un Etat, elle se présente comme une institution qui incarne la volonté d’un Etat d'œuvrer pour la promotion et la protection des droits humains. Elle est un bouclier pour les citoyens et l’ensemble des organisations de la société civile face aux abus et violations des droits humains et se présente et veille à l’application effective des conventions internationales auxquelles le Gabon est parti dans l’ordonnancement juridique interne. Cette institution, au Gabon, fait face à de nombreux défis et présente des limites quant à sa conformité aux principes de Paris, aux ressources financières et humaines limitées, ainsi que la présence des commissaires non permanents. Pour remédier à ces difficultés, les autorités gabonaises ont adopté la loi n°023/2024 du 21 novembre 2024 portant réorganisation de la CNDH et instituant le Mécanisme National de Prévention de la Torture (MNP) afin de conformer le Gabon aux exigences de la Convention contre la torture et son protocole facultatif ratifiés respectivement en 2000 et 2010.

L’effectivité de cette réforme induit une réorganisation de l’institution afin de lui rendre son autonomie budgétaire, son indépendance notamment par les modes de désignation de ses membres.

Cette réforme permettant à la CNDH de remplir pleinement son rôle conformément aux standards internationaux contribuera au renouveau démocratique et à la consécration de l’Etat de droit.

Le MNP, un impératif pour la garantie de la dignité humaine et la prévention de la torture et les mauvais traitements dans les lieux de privation de liberté

Le GIJ salue, la collaboration et l’ouverture des autorités gabonaises lors de la visite en mars 2024, du Sous-Comité pour la Prévention de la Torture (SPT), visite au cours de laquelle le SPT a exprimé sa préoccupation face à la non application des mesures destinées à améliorer les conditions de détention et à prévenir les traitements cruels, inhumains et dégradants.

En effet, le SPT a souligné le recours systématique à la détention préventive et sa durée excessivement longue comme la principale cause de la surpopulation dans les prisons. Il apparaît donc urgent pour le Gabon de s’attaquer à cette surpopulation carcérale afin de garantir le respect de la dignité humaine dans les lieux de privation de liberté.

Près de 15 ans après la ratification du Protocole facultatif à la Convention contre la torture, la mise en place du MNP, dont le rôle est d’organiser des visites inopinées de tous les lieux de liberté en vue de prévenir la torture et les traitements cruels inhumains ou dégradants, est impérative pour garantir la dignité humaine des personnes privées de liberté.

Une responsabilité pour les députés de demain

A l’heure où les projecteurs sont braqués sur la prochaine législature, il est important de rappeler que les députés qui prendront fonctions après lesdites élections, ne seront pas simplement des législateurs. Ils seront les garants d’un pacte de confiance entre le peuple et la République.

Réformer la CNDH et créer le MNP indépendant, c’est envoyer le message que le Gabon veut respecter ses engagements internationaux et faire des droits humains un pilier de sa gouvernance. Le GIJ appelle donc les futurs parlementaires à porter ces réformes non comme une simple réforme administrative, mais comme un acte de foi en la justice, la dignité et la liberté. Le GIJ réaffirme sa disponibilité à accompagner le Président de la République, le Gouvernement et Parlement ainsi que la société civile dans la mise en place du MNP au Gabon.

Les signataires :

Les Avocats ci-dessous sont signataires de cette déclaration :

Maître Djerandi Laguerre Dionro, Bâtonnier de l’Ordre des Avocats du Tchad

    Maître AMAZOHOUN Ferdinand, Collectif des associations contre l’impunité au Togo (CACIT)/Togo

      Maître AMEGAN Claude, Collectif des associations contre l’impunité au Togo (CACIT)/Togo

        Maître DOUMBIA Yacouba, Mouvement Ivoirien des Droits de l’Homme (MIDH)/ Côte d’Ivoire

          Maître RAHMOUNE Aissa, Ligue algérienne de défense des droits de l’homme (LADH)/ Algérie

            Christian LOUBASSOU, Action des chrétiens pour l’abolition de la torture (ACAT-Congo) / République du Congo

              Maître NKONGHO Felix, Center for Human Rights and Democracy in Africa (CHRDA)/ Cameroun

                Maître WEMBOLUA Henri, Alliance pour l’Universalité des Droits Fondamentaux (AUDF)/ RDC

                  Maître Annie MASENGO, Réseau des Défenseurs des Droits de l’Homme (RDDH)/ RDC

                    Maitre NODJITOLOUM Salomon, Action des chrétiens pour l'abolition de la torture (ACAT/TCHAD)

                      Maître NIYONGERE Armel, SOS-Torture Burundi/ Burundi

                        Maître ZANINYANA Jeanne d’Arc Collectif des Avocats pour la Défense des Victimes de Crimes de Droit International commis au Burundi (CAVIB)/ Burundi

                          Maître HAMADOU Kadidiatou, Association pour la Défense et la Protection et l’Enfant et de la Femme (ADEPE-F/ESPOIR) / Niger

                            Maître Chantal LENGA, Avocate au Barreau du Burkina Faso / Burkina Faso

                              Maitre NKONGME Dorcas Mirette, Center For Human Rights and Democracy in Africa (CHRDA)

                                Maître SOUILAH Mohsen, Centres SANAD/ Tunisie

                                  Maître KWAMBA TSIHINGEJ Frédéric, AFIA MAMA / RDC

                                  Maître TRAORÉ Drissa, Avocat au Barreau de Côte d’Ivoire

                                    Alexandrine TCHEKESSI, Changement Social Bénin


                                    Les organisations ci-dessous sont signataires de cette lettre :

                                    CEAD-Centre d'Etude et d'Appui au Développement local / Gabon


                                    Pour plus d’informations, veuillez contacter : Guy Valère BADANARO, Coordonnateur du Groupe d’intervention judiciaire/SOS-Torture en Afrique ; Collectif des associations contre l’impunité au Togo (CACIT) / Tel :(+228) 91 34 14 77. Email : guyvalre1@gmail.com

                                    Le groupe d’intervention judiciaire SOS-Torture en Afrique est un groupe d’avocats du réseau SOS-Torture de l’OMCT qui vise à contribuer à renforcer la prévention, la responsabilisation et la réparation des cas de torture et autres peines ou traitements cruels, inhumains ou dégradants. Il est constitué de 16 avocats africains et se trouve sous le parrainage de l’Organisation Mondiale Contre la Torture (OMCT) et du Collectif des Associations Contre l’Impunité au Togo (CACIT).