Égypte
22.03.12
Rapports

La liberté d'association en péril - Le REMDH et l'Observatoire inquiets de la dégradation des conditions d'exercice des libertés d'association et de rassemblement pacifique en Egypte

LALIBERTÉ D’ASSOCIATION EN PERIL :

LERESEAU EURO-MEDITERRANEEN DES DROITS DE L’HOMME ET L’OBSERVATOIRE POUR LAPROTECTION DES DEFENSEURS DES DROITS DE L’HOMME INQUIETS DE LA DEGRADATION DESCONDITIONS D’EXERCICE DES LIBERTÉS D’ASSOCIATION ET DE RASSEMBLEMENT PACIFIQUEEN EGYPTE

Au terme d’une mission d'enquête et de plaidoyer sur la libertéd'association et la situation des organisations de la société civile, conduiteen Egypte entre le 11 et le 14 février 2012, le REMDH et l’Observatoire pour laprotection des défenseurs des droits de l'Homme (un programme conjoint de laFédération internationale des ligues des droits de l’Homme - FIDH et del'Organisation mondiale contre la torture - OMCT) publient ce jour lesconclusions de la mission et constatent qu’un an après la Révolution, lesconditions d’exercice des libertés d’association et de rassemblement pacifiqueen Egypte se sont substantiellement dégradées. Nos organisations s'inquiètentnotamment des attaques directes menées par le gouvernement contre des ONGégyptiennes et internationales de défense des droits de l’Homme.

La délégation, composée de Kamel Jendoubi, Président du REMDH et membre duConseil exécutif de l’OMCT, de Raji Sourani, Vice-Président de la FIDH, deKhadija Cherif, Secrétaire Générale de la FIDH mandatée par l’Observatoire, etd’Abdessatar Ben Moussa, Président de la Ligue Tunisienne des Droits de l’Homme(organisation membre du REMDH, de la FIDH et de l’OMCT), a rencontré desorganisations égyptiennes de défense des droits de l’Homme, des représentantsdu gouvernement et du Parlement égyptiens, ainsi que des représentants de l’UE,d’Etats européens et des Etats-Unis.

La délégation a pu constater que :

1- La campagne médiatique et politique visant àdiscréditer les ONG de droits de l’Homme en les accusant de « faire le jeude l’étranger » est particulièrement néfaste et virulente, contribuant àminer le soutien public dont jouissaient ces organisations de la société civilequi ont joué un rôle important dans la révolution et dans la dénonciation desviolations commises par le régimede l’ancien président Hosni Moubarak;

2- Les attaques directes contre les ONG sepoursuivent : après les raids de décembre 2011 contre les bureaux deplusieurs ONG égyptiennes et internationales, 43 employés d’ONG américaines etallemande sont assignés en justice depuis le 26 février 2012, accusés d’avoirillégalement ouvert des bureaux en Egypte et reçu des fonds de l’étranger.Au-delà de ces fondations, ce sont lesONG de défense des droits de l’Homme en général qui sont visées par cesintimidations, visant à mettre un frein à leurs activités. En effet, depuis larévolution de février 2011, ces dernières continuent de dénoncer les exactionsdu conseil militaire, en particulier la répression féroce des manifestationsayant entraîné la mort de nombreux manifestants, ainsi que les atteintescontinues aux libertés d’expression, de manifestation et d’association ;

3- Bien que niant l’existence d’un projet de loidéfinitif sur les associations, les représentants du gouvernement ontclairement signifié leur intention de réformer le cadre législatif afin demaintenir les organisations de la société civile sous contrôle au travers dedispositions obligeant les associations à obtenir une autorisation préalablepour leurs activités, un contrôle accru des financements étrangers et uneinterdiction d’exercer tout type d’activité « politique », cettedernière visant tout particulièrement les associations de défense des droits del’Homme dans leur action de vigilance citoyenne et de dénonciation ;

4- En 2011, plusieurs manifestations ont étéviolemment réprimées, et certains défenseurs couvrant les violations des droitsde l'Homme commises dans ce cadre ont été arrêtés et victimes d'actes deharcèlement judiciaire.

Le REMDH et l’Observatoire expriment leur soutien aux organisationségyptiennes de défense des droits de l’Homme qui exercent leur rôle devigilance citoyenne dans des conditions de plus en plus difficiles et sontmenacées de poursuites judiciaires dans l’exercice légitime de leurs activités.

Nos organisations réitèrent leur préoccupation face à la dégradation desconditions d’exercice des libertés d’association et de rassemblement pacifique,et appellent les autorités égyptiennes à se conformer à leurs obligationsinternationales et constitutionnelles en la matière, notamment en mettant unterme immédiat aux poursuitesjudiciaires et aux actes de harcèlement à l’encontre des défenseur-es desdroits de l’Homme et des organisations non gouvernementales, et àenclencher un véritable processus de transition démocratique, indissociable del’existence d’une société civile plurielle et indépendante.

Nos organisations demandent également aux autorités égyptiennes de rapidement faire suite auxdemandes de visite du Rapporteur spécial des Nations unies sur les droits à laliberté de réunion pacifique et d’association, ainsi que de la Rapporteurespéciale des Nations unies sur la situation des défenseurs des droits del’Homme, notamment suite à l’intervention effectuée par la mission de l’Egyptelors du dialogue interactif avec la Rapporteure spéciale sur la situation desdéfenseurs des droits de l’Homme dans le cadre de la 19ème sessiondu Conseil des droits de l’Homme des Nations unies.

Le REMDH et l’Observatoire appellent particulièrement les nouveauxreprésentants du peuple égyptien au Parlement à rompre avec les pratiques dupassé et favoriser le développement et l’expression d’une société civile activeet autonome. Pour cela il est déterminant d’adopter un cadre législatif pourles associations conforme aux normes internationales en la matière, enconcertation avec les organisations de la société civile, dont certaines ontprésenté un projet de loi qui va dans ce sens. Il est utile de rappeler que les normes internationales sur la libertéd’association et les bonnes pratiques en matière de contrôle financierpermettent la transparence dans la gestion associative sans nécessitéd’interférence et de contrôle a prioripar les autorités.

Le REMDH et l’Observatoire demandent à l’Union Européenne de promouvoiractivement les libertés d’association et de réunion pacifiqueen Egypte, de mettre en pratique les instruments de soutien à la société civileétablis dans le cadre de la Politique européennede voisinage et les Orientations sur les Défenseurs des droits del’Homme, et de conditionner toute collaboration ultérieure avec le gouvernementégyptien à des progrès démocratiques réels et au respect des libertéspubliques.

Nos organisationsdemandent à la Rapporteure spécialedes Nations unies sur la situation des défenseurs des droits de l’Homme, auRapporteur spécial des Nations unies sur les droits à la liberté de réunionpacifique et d’association et à la Rapporteure spéciale sur la situation desdéfenseurs des droits de l’Homme en Afrique de la Commission africaine des droits de l’Homme et des peuples(CADHP), d’appeler les autorités égyptiennes à garantir l’intégrité physique et psychologique de tous lesdéfenseurs des droits de l’Homme en Egypte, à prévenir et mettre fin auxviolations desdroits et libertés fondamentales et enquêter sur toute atteinte éventuelle, en veillant à ce que tous lesauteurs soient traduits en justice.

Lesconclusions de la mission sont disponibles aux liens suivants :

http://www.euromedrights.org/files.php?force&file=Note_Mission_Egypte_FR_FINAL_232174518.pdf

http://fidh.org/IMG/pdf/note_mission_egypte_fr_final.pdf

http://www.omct.org/files/2012/03/21687/note_mission_egypte_fr.pdf
Contacts:

· REMDH:Hayet Zeghiche: +32 2 503 06 86 / Bérénice Michard: +33 1 48 18 06 86

· FIDH:Karine Appy / Arthur Manet: +33 1 43 55 25 18

· OMCT: Delphine Reculeau: +4122 809 49 39