Togo : 1er cycle d'examen du Togo sur les disparitions forcées

Afin de contribuer au premier cycle d'examen du Togo devant le Comité des Nations Unies sur les disparitions forcées, le Collectif des Associations contre l’Impunité au Togo (CACIT), l’Action des Chrétiens pour l’Abolition de la Torture (ACAT Togo) et l’Organisation mondiale contre la torture (OMCT) ont soumis un rapport alternatif sur la situation nationale en matière de lutte contre les disparitions forcées.
Ce rapport souligne que, bien que le Togo ait ratifié la Convention internationale pour la protection de toutes les personnes contre les disparitions forcées en 2014, de nombreux défis structurels, juridiques et institutionnels persistent pour sa mise en œuvre effective.
Des lacunes juridiques préoccupantes
Le droit togolais ne reconnaît pas encore la disparition forcée comme une infraction autonome, hors du cadre des crimes contre l’humanité. Cette absence empêche la poursuite systématique de tels actes, notamment lorsqu’ils ne relèvent pas d’une attaque généralisée ou systématique. De plus, la définition actuelle introduit une notion de « période prolongée » qui ne correspond pas à la définition internationale, excluant ainsi les disparitions de courte durée.
Un contexte sécuritaire propice aux abus
Dans le contexte de la lutte contre le terrorisme dans la région des Savanes, plusieurs cas de disparitions, détentions arbitraires et absence d’information sur le sort des personnes arrêtées ont été documentés. Cela concerne aussi bien des adultes que des femmes et des mineurs transférés dans des prisons éloignées, dans des conditions d’accès très restreint pour leurs familles. Le rapport souligne la nécessité urgente de garantir les droits des personnes privées de liberté et de leurs proches.
Victimes et devoir de vérité
Le rapport salue les efforts entrepris par le Haut-Commissariat à la Réconciliation et au Renforcement de l’Unité Nationale (HCRRUN) pour indemniser les victimes des violations graves de droits humains, y compris celles de disparitions forcées. Toutefois, il déplore l'absence d’investigations effectives sur les cas documentés par la Commission Vérité, Justice et Réconciliation (CVJR) – notamment les disparitions de figures telles que le lieutenant Tchansi Yao Béré Tiboukou-Tha ou David Ahlonko Bruce. Le droit à la vérité et à la justice demeure donc largement insatisfait.
Coopération régionale et extraditions à risque
Des cas inquiétants d’extradition ont également été relevés, comme celui de deux opposants équato-guinéens livrés à Malabo en 2018 malgré les risques élevés de torture et de disparition. Ces pratiques remettent en cause l’application du principe de non-refoulement consacré par la Convention.
Le rapport alternatif propose des recommandations pour la mise en œuvre des obligations du Togo au titre de la Convention internationale pour la protection de toutes les personnes contre les disparitions forcées :
- Réviser le Code pénal et le Code de procédure pénale pour incriminer la disparition forcée comme infraction autonome.
- Garantir un accès effectif à l’information pour les familles des personnes détenues.
- Enquêter de manière impartiale sur toutes les allégations de disparitions, même en l'absence de plainte formelle.
- Renforcer les mécanismes de réparation au-delà de l’indemnisation : vérité, justice, garanties de non-répétition.
- Interdire toute extradition vers des pays où la personne risque la disparition forcée.
Le rapport complet est disponible ici en français.