Tunisie
12.11.25
Déclarations

Tunisie : libérez le défenseur Jaouhar Ben Mbarek, en grève total de la faim et à l’état de santé dramatique !

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Paris-Genève, 12 novembre 2025En grève totale de la faim, de l’eau et des médicaments depuis le 29 octobre 2025, le défenseur des droits humains Jaouhar Ben Mbarek, entend dénoncer sa condamnation à 18 ans de prison, marquée par l’absence des conditions minimales d’un jugement équitable et l’acharnement judiciaire dans l’affaire dite du « complot contre la sûreté de l’État ». L’état de santé de Jaouhar Ben Mbarek s’est gravement détérioré, mettant sa vie en péril. L’Observatoire pour la protection des défenseur·es des droits humains (un programme conjoint de la FIDH et de l’OMCT) condamne fermement la détention arbitraire et le harcèlement judiciaire à son enctontre, et appelle les autorités tunisiennes à le libérer immédiatement et inconditionnellement.

M. Jaouhar Ben Mbarek, président du mouvement Doustourna, organisation membre de la FIDH en Tunisie, a entamé, le 29 octobre 2025, une grève totale de la faim, de l’eau et des médicaments, en réponse à sa lourde condamnation et détention arbitraires dans l’affaire du « complot contre la sûreté de l’État ». Son état de santé est aujourd’hui dramatique, et les autorités tunisiennes font preuve d’une indifférence totale face au risque imminent de décès.

Arrêté le 24 février 2023, le dossier ayant conduit à sa condamnation repose sur des bases fragiles voire inexistantes : aucune preuve matérielle, des chefs d’accusation vagues et politisés — « atteinte à la sûreté de l’État », « complot contre l’autorité de l’État », « appartenance à une entente criminelle » — et un recours quasi exclusif à un témoin anonyme dont la crédibilité n’a jamais été établie. La procédure a son encontre a été profondément viciée : audiences à huis clos, exclusion des journalistes et observateurs diplomatiques, comparution imposée à distance, absence d’interrogatoire de plusieurs accusé·es, et maintien en détention préventive prolongée.

Lors des audiences du 4 mars puis du 11 avril 2025, les familles ont été bloquées devant les portes du tribunal, les avocats délibérément retardés, les journalistes exclu·es. Le verdict rendu le 19 avril 2025, condamnant M. Jaouhar Ben Mbarek à 18 ans de prison, est venu consacrer un procès dépourvu des garanties les plus élémentaires d’un jugement équitable.

Ce 12 novembre 2025 après-midi, l’avocate Dalila Ben Mbarek Msaddek, sœur de Jaouhar Ben Mbarek, a livré un témoignage vidéo dénonçant les violences que son frère a subies au sein de la prison de Belli. M. Jaouhar Ben Mbarek a été conduit, dans une pièce à l’écart des caméras, où il a été violemment agressé par plusieurs détenus sur ordre de surveillants. Les traces de cette agression ont été constatées le 12 novembre au matin par son avocate Hanane Khemiri, qui lui a rendu visite et a immédiatement déposé une plainte pour actes de torture. Jaouhar Ben Mbarek a présenté de multiples ecchymoses et souffre de douleurs intenses lui permettant à peine de tenir debout.

L’Observatoire constate que le maintien en détention de M. Jaouhar Ben Mbarek illustre la dégradation alarmante de l’État de droit et de l’espace de la société civile en Tunisie, ainsi que l’instrumentalisation croissante du système judiciaire à des fins politiques. Il s’inscrit dans un climat de répression généralisée, marqué par des poursuites judiciaires contre des militant·es et défenseur·es des droits, des suspensions arbitraires des activités d’organisations de défense des droits humains, des campagnes de dénigrement orchestrées dans les médias, et des pressions croissantes sur les syndicats et les journalistes.

L’Observatoire appelle les autorités tunisiennes à garantir en toutes circonstances l’intégrité physique et psychologique de M. Jaouhar Ben Mbarek, notamment en lui donnant un accès immédiat à des soins médicaux spécialisés afin de préserver sa vie, à libérer immédiatement et inconditionnellement M. Jaouhar Ben Mbarek et l’ensemble des défenseur·es des droits humains arbitrairement détenu·es, ainsi qu’à mettre fin l’instrumentalisation de la justice pour opprimer toute voix dissidente dans le pays. L’Observatoire appelle également à enquêter sur les allégations de torture à l’enconte de M. Jaouhar Ben Mbarek et à traduire en justice les responsables de ces violations.